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paVupApRi - Page 84

  • border line melodies

    Quoique jeune encore
    mais sur le retour
    et pas tant pressé de s'aller rendre ses devoirs
    un pas familier
    décompte à rebours
    ses vestiges ajournés sur d'abruptes trottoirs

    Sois bon camarade,
    tape sur l'épaule;
    ça peut pas lui fair' de mal
    (c'est, de là, bonne école)

    ***

    Pour l'art de l'étourdissement
    porté jusqu'au ravissement
    (comme l'autre de liane en liane)
    il s'affiche nu sous son pagne
    un singe empaillé sur le flanc
    - le dimanche, immanquablement !)

    Aux yeux de tous, vous dis-je !
    Quen j'en ai des vertiges !
    Aux yeux de tous, monsieur l'Agent

    Et poussant des cris de Sauvage
    Et des postures, davantage...!

    Ah, sinécure, Jésus Christ !
    d'avoir engendré tel artiste !

    ***

    Il était vain d'entasser là
    dans ce véhicule
    hauts débits sur le contrat
    les contritions de forçats
    arrachées à leurs misère
    sur le simple préambule
    d'une poignée délétère

    Transit à l'aire dounanière
    un parfum de mort
    émane d'un container
    parqué sur le port

    Quel sinistre ridicule
    que leur triste anonymat !
    Pitance crédule
    ils étaient vingt entassés, là

    ***

    J'aime comme je le hais
    cet espace infime
    où je n'ose m'aventurer
    par le désir, ni le toucher
    vers les trésors parfumés
    de l'Autre, à son intime

    ***

    Devant, sous la lueur matinale, embrumée
    dans sa vaste candeur, le labour en sommeil;
    dessus, l'envol subit et criard des corneilles;
    derrière, à pas de loup, la faune du bosquet

    L'ennui s'est, peu à peu, teint d'humeur assassine...
    Au pied, la carabine attend, le chien cranté.
    Jugée sur l'incurie de sa bonne santé,
    l'ignorante enjouée avance vers sa ruine.

    Un éclat stoppe net, plus mat que le tocsin,
    le fol et bel entrain de sa course amoureuse
    et la laisse sans voix - finie, la chansonnette !

    Elle n'a pas le temps de porter à sa tête
    la main charnue disant ses formes plantureuses,
    un filet rouge sang mêle son rideau brun.

    ***

    - How d'you feel?
    - Fine... What about you?
    - Border line, thank you.

     

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#172

    un roi sans divertissement 

     Et aussi, cette précédente participation pour le thème du "Message sur le frigo"
    - Impromptu Littéraire - tiki#171

     

    Tout ça pour un mot
    collé sur le frigo
    Malgré les degrés sous zéro
    je suis allé marcher sur l'eau
    ma tête au bord du lac
    à l'envers dans un sac
    ça puait le vieux pain, le poisson
    comme s'il en pleuvait à foison
    quand je l'ai retirée
    de la jute encore imprégnée
    Quoi ! Tout ça pour l'enfer
    d'un mesquin Frigidaire ?

    Tout ça pour un mot
    un sacré mot de trop
    Un défi jeté par dépit
    pour avoir déserté le lit
    de nos vaines amours
    au fantasque Toujours
    où brûlent sur un brasero
    une incomplète libido
    qui noie de la semaine
    le doux fumet de madeleine
    Et tout ça pour l'invite
    d'un capricieux post-it ?

    Tout ça pour la gloire
    de taiseux mésespoirs
    Pour, des clous plein les pieds, les mains
    porter le fardeau quotidien
    de ce luxe : tes doutes
    sur ma trop frustre écoute
    Et quoi ! ne suis pas saint, mais homme
    et comme toi dans le barnum
    pauvre, nu, singulier
    mais fier et, malgré tout, entier
    et relisant ton mot
    collé sur le frigo :

    "Et quoi, vieux !
    Tu te prends pour Dieu ?"
    Oui, ça ! J'en relève l'enjeu !

     carambar

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    tiki#171

     

  • auguste barnum

    Une barque feule à deux voix sur le canal
    un chant d'amours désespérées, d'un autre siècle
    Le ciel, déçu, frotte les toits de son couvercle
    pour se gratter des pelures sentimentales

    Le cirque bien connu replie son chapiteau
    pour le porter ailleurs où manque le spectacle
    des petits bonheurs attendus et leur débâcle
    qu'applaudiront les rires niais des angelots

    Le tout payé du triste solde hebdomadaire
    les mains rentreront chatouiller les poches vides
    longeant le fleuve mou et sa lente clepsydre
    songeant peut-être à d'exotiques dromadaires

    Plus tard, les yeux compris entre ses deux seins lourds
    le regard amorti de strass et de paillettes
    Monsieur, dans l'abri sûr de Madame S'en-tête
    - ce verrat chevauchant ! lui dira son débours

    Moi, l'aube reparue sur le terrain désert
    je tirerai des clous du sol, en fredonnant
    ma dernière grisaille et me remémorant
    le froid que j'ai connu d'avoir aimé, naguère

    Une Parque sans voix, un domaine abyssal
    qui chantait sa partie - à qui j'ai dit « je t'aime »
    et qui n'entendait rien, sur le fleuve bohème
    qu'à peine le vent nu, sur ses ridules sales

    Alors, le rouge né à mes joues ravacholes
    je promène le nom que me donne mes filles
    et nous irons, ce soir, vibrer aux peccadilles
    du grand chapiteau cru aux fantasques écoles

    Et ce sera bonheur d'avoir, à mes côtés
    l'une et l'autre riant, chantant l'hymne sauvage
    d'avoir dompté le temps pour le seul avantage
    d'être, en l'état, l'amour et l'instant partagé

    Et le fleuve rigole, et le matin sourit
    Deux astres dans les bras, j'ai tiré le rideau
    que leurs projets de joie ne soient pas sans écho
    mais se créent, à leur tour, une pure magie

    youpiBon, je n'ai pas su faire - et n'en suis pas moins homme
    amoureux, pas peu fier, d'avoir entre les bras
    deux galaxies dormant sur mes vieux reliquats
    tandis que, par les rues, s'anime le barnum

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • Des flores, guéris donc !

    Me suis allongé là, sur la mousse anonyme
    moelleuse comme un cœur (ou sa bouche éponyme)
    avec un pli du soir dans le linge des ormes
    où je rêvais le nom de ma prochaine forme

    Il a plu sur mon dos les frissons lumineux
    arrachés aux grands cieux par ses ongles vengeurs
    une invisible humeur, éprise de mes yeux
    d'accord avec mon âme, au rire baladeur

    Calme, une chanson née d'un souffle rassagi
    murmura des ennuis l'orage passager
    sur un mode mineur à quoi j'abandonnais
    la dernière curée qui m'aura bien nourri

    Rendu à l'évidence allongée près de moi
    je lui ai pris le bras comme au bal on s’appelle
    ou, finie la semaine, on se promène au bois
    des embruns dans la voix pour faire un brin de zèle

    Oubliés les grands cieux (le ciel à son barnum
    avec ses chauds, ses froids, sur la carne des hommes)
    je me suis réfugié en douce compagnie
    fébrile... virginale ?

    Bacillaires orgies, gavons-nous de sang frais
    Parcourons le séjour sans craindre son loyer
    Désordres saisonniers, à nos hémophilies
    d'avides carnavals !

    Il y a de la place, où bien s’organiser
    des alcôves spongieux bordés de rouges fleuves
    de la chair amollie qu’enfin je m’y abreuve
    en son Café de Flore aux guéridons cirés

    Eh ! Qui m'a reconnu ? Qui a donné l'alarme ?
    À peine si j'ai pu... voici qu'on me désarme !
    Qui me juge, m'assaille avec force dédain ?
    Horreur, la médecine ! Au diable, ses vaccins !

    santéNon, mais quelle ironie… !

    Saloperie de science ! Ah, pleure, maladie !

     

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#170
     

  • Poucet mort

    Gaëna da Sylva, photographe

    N'est-ce pas ? N'est-ce pas... Tu l'as mangé, mon cœur
    poêlé, aller-retour, et aux petits oignons
    Tu l'auras cuisiné sur une noix de beurre
    sobrement épicé, entouré de lardons
    avec, pour agrément, persil, pommes-vapeur
    et, au dernier moment, une pincée de selles

    N'est-ce pas ? N'est-ce pas... Tu me l'as arraché
    tandis que je dormais dans un pli de ton bras
    le songe appesanti sur ton corps parfumé
    assommé de content - peut-être mort, déjà !
    ayant livré aux draps nos fastes crudités
    dans un inénarrable et vorace festin

    N'est-ce pas ? N'est-ce pas que tu m'as accueilli
    au plus fort de la nuit, guidé par ta lueur
    Tu m'ouvris la demeure où n'étais plus celui
    parti chasser, d'instinct, pour ses viles ardeurs
    la chair incompatible, avec tant d'appétit !
    J'étais venu, marri, perdu et affamé...

    N'est-ce pas ? N'est-ce pas que que tu montrais mon but
    puisque j'étais enfant, courant son devenir
    bardé d'une fratrie trop jeune pour la lutte
    et qui me reprochait de ne savoir grandir
    plus haut que les parois qui nous semblaient abruptes
    et ne préfiguraient qu'un terrible abandon

    N'est-ce pas ? N'est-ce pas que je suis dans ton sein
    puisque tu m'as mangé, mon ogresse anonyme
    lumiere_018psyche1.gifJe n'en ai pas souffert; au contraire, il me vient
    à l'idée que c'était, d'impérieux paradigme
    une nécessité d'arriver à ce point
    où l'enfance prend fin, par une autre naît sens

    Les bottes sur le seuil de mon nouvel endroit
    comme un acte de foi, témoigner de ce deuil
    qu'il m'aura fallu faire; et, pour alarme à l’œil
    la science de ces nuits hantées par mes abois
    quand se vidait mon sang vainement sur la terre
    de Lumière et de Vie, aujourd'hui être père

     

    tiniak ©2012 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    Illustration d'en-tête : Gaëna da Sylva.

  • fruta prohibida

    J'ai croqué, en chemin, le fruit de la lumière
    Le temps de digérer, je suis né mille fois
    J'ai regardé partout, je n'étais plus chez moi
    Sous mes pas, j'entendais comme gronde la terre

    Je n'étais plus chez moi, j'habitais tout le monde
    Son chaos m'arbitrait, sans faire le ménage
    Je devais balayer, rattrapant mon courage
    astres et météores, des montagnes, des ondes...

    Sinon, comment poursuivre - et, d'ailleurs, aucun but !
    Comment te retrouver, molécule partiale ?
    Le temps se comprimait dans un œuf sidéral
    La distance n'était que le chant d'une flûte

    Le sol se jouait de moi, à gorge déployée
    Son rire m'enivrait comme un nom fraternel
    J'ai cru te retrouver dans une ritournelle
    mon égale agonie, mais je me suis trompé

    Je ne suis qu'empathie, rêverie, chromosome
    unitaire et complet, dans un verbe fragile
    Ce que j'ai su du sort se révèle inutile
    et futile ce nom que me donnaient les hommes

    Je chante avec la pierre et la luminescence
    J'embrasse les pieds nus d'une comète froide
    La peur est, sans objet, une girouette roide
    Le bonheur est un jus où baigne l'inconscience

    Ma main s'est oubliée dans une autre caresse
    Mon sang nourrit un ogre au sourire incertain
    Mon âme est l'invitée d'un affable festin
    Je ne suis plus entier - qu'importe ! Quelle ivresse !

    Un soupir amical me borde la pensée
    T'aurais-je retrouvée, mon ombre nécessaire ?
    Mais, des ombres, j'en ai plus que des millénaires
    Ici, tant de soleils s'ingénient à briller

    Je vais me réveiller, dites, parcelles folles ?
    Je ne vais pas rester dans cet universel !
    Je voudrais retrouver mes matinales selles
    Je veux pouvoir mourir près de toi, mon école !

    J'aurai bientôt fini d'évacuer ma substance
    En ai eu connaissance, et cela me suffit
    Il m'en restera bien quelque chose à l'esprit
    quand j'aurai recouvré, Vie ! mon inconsistance

    Mais ne t'en dirai rien, ma probable douleur
    Tant il est vrai qu'on n'est jamais sur cette terre
    mortelle et sans espoir, qu'un rêve solitaire
    se couvrant du sursis de ta brève chaleur

    Amour,
    dont le mystère entier est à l'œuvre, toujours.

    Fruta prohibida

    tiniak ©2012 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    voir aussi chez Manuel Álvarez Bravo