Avant l'été, j'aurais marché
vint-cinq années durant
les yeux derrière
les yeux dedans
et des mains à ne plus savoir qu'en faire
battant mes flancs
battant l'air
balançant d'avant en arrière
aveuglément
Si j'ai séjourné quelques fois
- en quelque endroit sûr ? à la brune ?
à jouir de la bonne fortune
d'une merveille...
rotonde et vieille craie
marée, varech et moules frites
nuit tombée sous les oliviers
chimers, sillons océantiques
et puis la grève
où le marin mugit depuis son Rêve
j'émergeais toujours au-delà
- j'aurais cheminé malgré moi
...suivant un chien ? ...dans mon sommeil ?
sans reconnaître rien à rien à mon réveil
J'étais allant
obstinément
coiffé de mes deux grands soleils
me figurant simple et pareil
au bonze en bronze recueillant
des mantras le long chant de veille
Aux abords de la ville
je laissai mon bagage
- à d'autres d'en tirer bel avantage
Je percevais, subtile
mais pas mystérieuse
une rumeur aux notes savoureuses
Leur écho sur le fleuve
ricochait - ce me semble,
entre les bras des saules sous les trembles
Le jour s'arrêta à mi-cours
je sus dès lors m'appartenir
qu'il durât encore et toujours
Je pris un citron vert
pour en goûter le jus
je crus m'éparpiller dans l'atmosphère !
D'abord effarouché
un sang moins lapidaire
me parcourut l'échine et les artères
Depuis son vieux clocher
l'horloge familière
sonna ces vint-cinq années passagères
Je sentis ta main pleine dans la mienne
La peur se tenait loin de nos regards
L'aujourd'hui recouvrit figure humaine
Nous marchions sous les feux de quatre phares.
tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
René FRERY, Les Quatre Soleils, 2002.