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pastorale

  • Nommée à temps

    Puisque des arbres plient sous le ciel gris les bras
    maigres, presque sans vie, craignant la pluie de fer
    que d'un œil a jailli le regard plein de terre
    où des chairs massacrées pourrit l'anonymat

    Je me dis qu'il est temps...

    Puisque des vignes saigne un vin de messe odieux
    âpre et plus souffreteux qu'un ragot de reptile
    qu'un langage de mort aux  brames érectiles
    a brisé les charriots du Rêve par l'essieu

    Il est temps que la fleur...

    Puisque des mottes gronde une plainte sans voix
    au chapitre du monde et de sa destinée
    que, va ! l'heur attendra le compte des ânes nés
    sur leurs engins de mort, voraces et sans loi

    Bientôt montre les dents...

    Puisque les enfants crient plus fort que de raison
    pour aller s'entretuer plus vrai que de nature
    sans jamais se risquer à vivre l'aventure
    la renient et l'abhorrent, et navrent la maison

    Je me dis qu'il est temps...

    Il est temps que la fleur
    bientôt montre les dents
    du sourire éclatant
    que se doivent les cœurs
    puisque c'est le printemps
    qu'il a ton nom : ardeur !

    Youpla !tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#175

  • florales lies

    Floralies sans merci pour aucun élixir
    s'agitent, m'habitent, œuvrent à me saisir
    l'instant d'après m'entourent
    l'instant suivant m'effleurent
    la plante à l'intérieur, son recueil de velours
    jusqu'à tant que j'en meure... et encore... à plaisir...

    Je n'ai pas tout cueilli; des friches, des labours
    me peupleront l'encours de parfums méconnus
    que j'aurai pressentis dans une vague alarme
    Il en naîtra, des fruits ! crus, à même le sol
    au revers d'une nuit de marasmes frivoles
    où certain jour enfant déposera les armes
    et ce sera vertige
    de savourer leurs chairs de bulbes callipyges

    Parcours, mon cœur séduit, l'époque et la distance
    Va te joindre à leur dense
    leur immense caresse
    et reviens confesser par les vastes contours
    de cette moelle à frire, quelle fut ta licence
    et le goût que j'en ai... encore... et à plaisir...

    L'entier par-devers l'huis des prochaines essences
    je lève un abattis de fausse humilité
    Il est plein du défit de mon humanité
    ses limbes colorés à l'Unique Présence
    décorent Son Abri d'Insigne Suffisance
    à la souche moussue, au regain fatigué
    quels que soient le printemps
    ta promesse d'amour et l'oignon florissant

     

    Jivko, Offrandetiniak ©2012 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    Illustration : Jivko, Offrande

  • saulitude 125

    saules de Vincennes

    Vincennes, 10 janvier 2010

    Gazouillis si particulier
    que les chants d'oiseaux le matin
    Grave, aigu, à proximité
    l'un à l'autre de loin en loin

    Il me semble y pouvoir entendre
    harmonieusement concentrés
      une réponse à son appel
      l'ivre désir à la parade
      la faim du jour dans sa nacelle
      du chapardeur la dérobade
      l'entrain, la fuite
      et quelque autre notion profonde
      - qui m'est interdite, du monde

    Ramassée sur sa branche
    la poésie que rien n'étanche
    est assoiffée
    le fleuve las, n'y suffirait
    ni la pluie,
    ni la beauté que je t'envie
    grand saule,
    à qui voudrais tendre l’épaule

    Où t’emmener du bout des doigts
    hors cette fraîcheur qui décroît
    mais traîne ?
    Que ferions-nous de la semaine ?
    De novembre ?
    Et de la jalousie des trembles ?

    tiniak © 2011 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#102
    en 125 mots, donc.

     

     

  • largo

    SOIR.JPG

    Un jour s'en est allé faire ses bruits ailleurs
    Le soir demeure
    (il n'attendait que ça)
    Il attendait que cela passe
    le cortège des heures
    la retraite des guerres lasses
    aux humeurs vives ou fadasses
    avec, à la traîne,
    ce lent petit bonheur
    d'être à ce qu'on amasse au cœur

    Le soir et ses largesses...


    Il accueille la nuit du bout des lèvres;

    un murmure semblable
    à celui que s'adressent les arbres
    soutire à l'air
    une molle fraîcheur
    qui retourne la peau striée de l'atmosphère
    en force la pudeur et laisse voir
    les gouttes de sueur perlant à son grand casque noir

    Il ouvre des maisons les yeux luminescents

    tout engourdis encore
    de s'être trop longtemps regardé l'intérieur
    où des ombres rejouent le ballet quotidien
    - qui a sorti le chien
    qui a dressé la table
    qui marmonne à l'oreille irritable
    qui scrute le chemin
    chacun à son affaire
    certain de n'être pas si fier
    que le voisin

    Il allonge le pas du temps qui reprend souffle

    et prépare son rêve à l'abri des regards
    Il pouffe
    Il aime ces récits arrachés au réel
    et comme les compose à nouveau l'inconscient
    pour que les doigts du vent les saupoudrent
    sur les paupières closes à coudre
    avec l'antique et magique sel
    qui vous garde des foudres paternels

    Il cède

    quand la vasque du ciel est pleine
    sa place aux chevauchées astrales
    sur les voies cardinales tracées
    pour leurs frasques élyséennes

    Il plaide

    une journée chômée
    qui ne voie pas truffée
    d'obscures hypothèques
    l'humaine destinée
    exempte de salamalecs
    et autres simagrées
    où sa clémence vespérale
    aura - toute, à loisir,
    sentimentale bariolée
    vive cavalcade effilée
    rousse nuée de fougères,
    le don de ceinturer la terre
    pour en araser la lisière

    Et puis, il disparaît

    loger dans une volée d'arbres
    rouler au creux d'un vallon glabre
    se pendre au rempart crénelé
    d'autres vertigineux sommets
    border la mer étale
    l'océan pacifié
    glissant sur la pointe des pieds

    Il nous a préparé

    avant de regagner son lit
    une aube, pliée
    au coin de la table de nuit

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • soleiado

    Les cailloux rudoyés rendent à la lumière
    la brute impunité de sa vive arrogance
    avant de succomber, aveugles, l'un sur l'autre
    en ayant regretté de mordre la poussière
    sans pouvoir y goûter, d'infime rémanence
    un parfum d'herbe grasse où la bête se vautre

    (...ailleurs, en Normandie peut-être...
    Ici, le pays est à l'heure : il est Midi
    et pas l'ombre d'un hêtre)

    Même - oui, je le vois, même les mouches boudent
    dédaignant l'ordinaire à mettre sous le coude :
    et la pâtée scellée en croûte à l'écuelle
    du chien qui a trouvé refuge à l'intérieur
    et le massacre avancé d'une tourterelle
    qu'un mauvais vent nocturne a jeté dans les fleurs

    (les moins folles collent à la toile cirée
    d'autres grésillent au papier-vrille
    l'abdomen englué)

    Massif, un lavandin ébouriffé somnole
    entre deux pieds de thym et une ciboulette
    dans le vieux jardinet où les simples survivent
    et bradent les parfums de leurs derniers alcools
    à l'ordre industrieux des voraces insectes
    qui nourriront bientôt un escadron de grives

    (quand  le ciel sera pris au jeu
    d'une saison moins sèche
    et se fera pluvieux)

    Au mur pestiféré les jointures fatiguent
    sa face égratignée par l’assaut des bourrasques
    ne sait plus témoigner que de sa déchéance
    ses débris de mortier traînent dans la garrigue
    où ne s’entendent jouer ni la folie des masques
    ni les flûtes boisées des païennes bombances

    (seul - et tenace alors, le Mistral
    arrache à cet endroit
    le fantôme d’un râle)

    Par là, c'est la fenêtre - aucun volet ne l’arme,
    un cloaque où s'empêtre une obscurité morne
    et peine à se commettre, avec les traces d'huile
    imprégnées de salpêtre, une frise de charmes
    cherchant à l'égayer de ses reflets argile

    (mais c'est peine perdue, ces brillances
    sur la maison de pierre
    où je n'habite plus)

     

    9003.JPG

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK