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fantômes

  • vieux pore

    Quelques lignées de vert encadrent le vieux port
    mais leur sort saisonnier y grave des rousseurs
    L'œil nu qui les connaît se fendrait bien d'un pleur
    mais un souffle apaisé remonte vers le nord
     
    De fragiles risées mouillent près des bateaux
    leurs encres dégrisées par des reflets divers
    L'enfant trop entouré y jette ses hivers
    en n'ayant pas idée qu'il invente ces mots
     
    Je fume les années que je ne vivrai pas
    mais l'ombre est occupée à d’esthétiques plans
    Peut-être émerveillé, je reste sur ce banc
    fantasquement flatté de ta forme à mon bras
     
    Oui, j'aime te garder - ces instants favoris !
    une place de choix, contre toute raison...
    Quoique tu sois ce soir, ailleurs - à la maison !
    tu es là, près de moi et le soir nous sourit
     
     

    Laurence Le Masle

    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK 
  • matutinal tango

    L'humidité traîne-savate
    cimente un rang de peupliers
    qui ont bu toute la nuitée
    et n'en peuvent plus de l'eau plate

    Moi, de mon content de houblon
    j'ajoute à l'aube un jaune pisse
    avant que tout ne reverdisse
    dans la grisaille où je me fonds

    É-oh !
     matelots à semell's de crêpe
     tous les chignons sont repartis
     lisser leur jupe au pied du lit
     les yeux remplis de Johnny Depp

    O-é ! O-é !
     C'est pas déjà la fin de tout
     tant que ça tinte au fond des poches
     le patron sera pas si moche;
     il nous paiera son dernier coup
     (avant le nôtre)

    Allez, on chante :
     Cassiopée! Cassiopée !
     courant après le Capricorne
     Prends garde que ton double V
     inopinément ne m'éborgne !

    C'est bon, patron...
     t'as assez vu nos trognes
    Allons, garçons
     dehors serrer nos pognes

    Ah, ça y est ! les oiseaux s'y mettent
    et ça moin'zingue à tout berzingue
    Adieu, mon rade ! adieu, mon zinc !
    L'heure a sonné du mal de tête

    Je passe en mode automatique
    mes pieds connaissent le chemin
    ma tête est aux anges... s'y tient
    conciliabule ésotérique

    Rupture de rythme au Zodiaque
    Fractale parole... Chlac !

    Comment t'appelais-tu, corolle à bout de sein ?
    Tes cris de folle m'allaient bien

    Viens, que je t'attribue la chanson sur mes lèvres
    “She's not the girl who misses much
    ... ambitioning the back of a black car”
    et rêve ta bouche, ce phare !

    Ciel ! ton rouge baiser m'orange
    le fleuve écoule un miel échange avec les lampadaires
    qui rangent les débarcadères

    Sous les maisons bien à leurs places
    les jardinets effacent
    des brumes les dernières traces

    Et des vendredis de poisson
    passent, passent Bir-Hakeim
    passent, passent sous les ponts
    pompons, mitaines... saison !

    Suffise à l'harmonie
    des petits matins en repli
    des cors de nos corps l'hallali

    La la li, la la lère
    et voici le chemin de fer
    en sa réminiscence
    des martyrs de la Résistance

    (Ai-je tout gravi l'escalier
     sans faire de bruit ?
     Je suis déjà couché…
     C'est encore aujourd'hui)

    Ces nuits passées à te chercher où tu ne peux pas être
    (c'est à pas s'en remettre)
    et sans rien à pleurer d'à la fenêtre

    Monet_1891-Rangée de peupliers.jpgC'est tout du petit lait
    quand je songe à ces matinées
    à leur tango

    O-é ! O-é ! matelot…

     

     

     

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    illustration : Claude Monet, 1891.

  • (mékesskila)

    Cette voix qu'il a
    chaque fois qu'il a
    affaire avec ses anges
    me ronge, me dérange
    me mange le foie

    me couche à terre
    contre la pierre
    comme un pénitent gris

    mais quoi ?

    briser la glace
    à pleine face
    et confondre sa nuit ?

    moi qui n'ai que le jour
    et mes yeux de velours...

    Cette voix qu'il a
    chaque fois qu'il a
    rattrapé un fantôme
    il pleut d'entre ses paumes
    le sang des rois

    il pleut des madeleines
    sur les campagnes vaines
    où fanent les dimanches

    et quoi !

    le jardinier
    s'en est allé
    ailleurs trousser ses manches

    et moi qui n'entends rien
    aux choses du jardin...

    Ce regard qu'il a
    chaque fois qu'il a
    une ombre à la fenêtre
    je pourrais disparaître
    entre ses pas

    m'emporte l'âme
    comme une lame
    affole l'océan

    et puis retombe
    dans cette combe
    où dorment des géants

    et moi si jeune encore
    vibrant de tout mon corps...

    Oh, regarde-moi
    Oh, embrasse-moi
    je suis la vie aimante

    Oh, épouse-moi
    Oh, célèbre-moi
    et que tout me contente

    D'un geste
    un mot de toi

     

     

    aLaPlume.JPG

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • vinum veritas animae

    Ta vie, petit vin de pays
    m'emporte mieux les songes que ces carnavals
    pagan poetry!ces ridicules abattis
    au modelé d'éponges caricaturales

    Ta fleur, aérienne torpeur
    où je puise à la source mon rêve abyssal
    effleure une idée de bonheur
    et prolonge ma course d'euphories astrales

    Ton corps a ces reflets de l'or
    qui fragmente les ondes sur la mer étale
    j'y dore un songe, météore
    embrassant des eaux blondes, septentrionales

    Ta chair appelle de la terre
    la puissance féconde et les orgues vitales
    dans l'air marin qui réverbère
    les rayons de ta ronde, lune ornementale

    Pour encore un bouquet de toi
    je veux lever mon verre au vent qui me rapporte
    hay-dee-ho!alourdi de muscat
    un murmure, ton chant

    Va, plus jamais je n'aurai froid
    quand ayant bu mon vers, tu liras de la sorte
    en termes délicats
    je suis donc ce vin blanc ?

     

     

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • à taaaable!

    le_banquet_big.jpg

    à présent tous autour de moi, mes vieux fantômes
    partageons de ce beau repas la bonne chère
    des saveurs dont les vins, les plats, livrent l'arôme
    gavons nos peines, nos tracas et leurs chimères

    viens donc t'asseoir auprès de moi, ma peine brune
    toi qui d'une oeillade laissa pour lettre morte
    mon chant disant de ton aura l'antique rune
    ai-je bien mûri, selon toi ?

    mais que m'importe...

    ne t'étonne pas d'être là, Judas, mon sang
    d'aussi loin que mon souvenir est bien vivace
    tu marchais toujours dans mes pas, chemin faisant
    vois comme tout peut aboutir

    de guerre lasse...

    j'ai toujours cet éclat de rire à mon oreille
    balayant des doutes le pire et m'assurant
    des nuits brèves comme un soupir et que tu veilles
    jusqu'à ce jour où il faut dire

    adieu, maman...

    ouvre donc tes mains sur la table, coeur d'ébène
    ne les laisse pas dire encore "ainsi soit-il"
    j'y cherche un abri confortable pour les miennes
    les sachant plus aimables qu'alors,

    immobiles...

    maintenant debout devant vous, le bras levé
    je n'ai pas empli de vin doux mon gobelet
    mon hommage a le goût sucré des embrassades
    après une bonne gorgée de limonade

    je viens manger des madeleines
    triturer du doigt ces boutons
    écouter de vieilles rengaines
    les yeux plongés dans le sillon

    je viens chevaucher l'herbe haute
    où s'affolent des papillons
    peindre aux armes des argonautes
    glaive et bouclier de carton

    je viens gober du boudin noir
    perdre en forêt mon escadron
    fumer à la tombée du soir
    battre le groka tout du long

    je viens donner la sérénade
    les pieds gelés sur le perron
    feindre n'être que trop malade
    le nez caché sous l'édredon

    et goûtant d'autres madeleines
    coloriant d'autres papillons
    répondre au chant de la sirène
    qui viendra me baiser le front

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK