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carnÂges - Page 42

  • la faim du monde

    l'oeil était dans le livreJe les ai bien entendus, moi

    les vents savants

    dans leur élan

    aussi sauvages que l’enfant après ta chevelure

    grimpant aux arbres

    raclant les murs

    faisant vibrer les devantures

    levant le voile et les vivats

    des garçons agitant les bras

    ça rigolait dur sous la douche

    là où la gouttière fait mouche

    ouvrant le col comme une baie

    et nous menait, tu sais bien où

    tout doux tout doux

     

    Je les ai bien respirées, moi

    les fleurs nouvelles

    à rimer à la bagatelle

    ployant le cou sous la caresse

    disposées à d’autres largesses

    assurées du tendre à venir

    et ça s’affaissait sous nos doigts

    affolés par, tu sais bien quoi

    leurs tiges nous striant le dos

    leurs jaunes dans ton indigo

    avant de garder notre empreinte

    sur la pairie, repeinte

    qui sembla n’attendre que nous

    Tout doux tout doux

     

    Je les ai bien embrassées, moi

    les ondes claires

    au cours disert

    murmurant des contes païens

    roucoulant le nom des marins

    vers les nuées depuis la source

    et ainsi jusqu’à la Grande Ourse

    où nos larmes se sont trouvées

    je me retourne et je te bois

    liqueur de la Vallée des Rois

    et tu goûtes mon élixir

    sur l’écho flottent nos soupirs

    nos genoux lissent les cailloux

    tout doux tout doux

     

    Je les ai bien admirées, moi

    les flammes vives

    or vacillant à la dérive

    cuisant les soupes de brindilles

    que nous ont préparées les filles

    se figurant maîtresses femmes

    leurs mouvements brûlant nos âmes

    j'en cherche encore tout le secret

    te couchant nue près du foyer

    dont la chaleur est moins exquise

    que celle où tu as la main mise

    tandis que la fumée s'élève

    tout se consume autour de nous

    tout doux tout doux

     

    de tout cela, que verras-tu

    ma petite fille aux pieds nus sur le carrelage

    quand tes yeux auront pris de l'âge

    et que mon temps ne sera plus ?

    l'oeil d'Horus

     

    horus tiniak © 2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • mange tes morts, mon ange, mange

    ann_Ange.jpg
    il n'y aura de mort après ma mort, petit
    aucune autre que la tienne
    et le sang du tourment tombera jusqu'ici
    rousse et douce pluie diluvienne
    noyant tout, pauvre fou
    de tes mornes courroux
    et tes prétentions inhumaines
    je viendrai précédant
    le cortège brûlant
    des trop vieilles carnes et couennes

    tu as faim mon petit, mon trésor
    tu t'agites et la fin te dévore
    sur la table vide
    ton assiette est vide
    retourne-toi
    mange tes morts

    il y a tant de morts devant la mort, petit
    qu'elle même en a perdu le souffle
    la vertu, la débauche, elle fauche, elle fauche
    le saint, le sage et le maroufle
    racle bien, pauvre nain
    de tes ongles de chien
    la faïence qui couvre la glaise
    plus rien n'est incertain
    entends, sur le chemin
    mon pas, foulée dans la fournaise

    que crains-tu mon petit, mon trésor ?
    que peux-tu bien espérer encore ?
    sur la terre aride
    sous le ciel torride
    ils sont à toi
    mange tes morts

    me voici devant toi, petit
    reconnais-moi, je suis la vie
    j'ai brûlé mes ailes
    à tes sempiternels
    et insatiables appétits
    me voici devant toi, mon ange
    vois, comme je n'ai plus rien d'étrange
    mais cette épiphanie
    annonce qu'il est cuit
    ce dernier repas que tu manges

    tu n'as donc plus faim, mon trésor
    avant que d'être un cri est mort
    dans tes yeux avides
    déjà le vide
    installe son règne d'or

    l'univers abandonné
    redevient sourd, aveugle et muet
    qu'un ange passe
    plus personne, hélas
    plus personne pour s'en soucier

    ah ça, petit! tu t'es gavé!

    texte de norbert tiniak
    inspiré par une bulle dorée d'Anne
    © 2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • car l'âge

    nebulaok.jpg

    Elle aura pourtant cherché partout, frénétiquement d'abord, puis, désemparée, en déambulant partout où elle était déjà passée constater l'évidence : plus là!

    Elle n'était qu'à demi vêtue quand le soupçon l'a surprise.
    Elle avait donc quitté la chambre (jaune et bleue) en sous-vêtements rouges et noirs, parcouru toutes les pièces avec à l'entour des yeux un halo virant de l'orange au blanc, pour finir dans la salle d'eau et ses faïences indigo.

    Elle aurait voulu s'envoler par la fenêtre, se cacher sous le lavabo, se noyer dans la baignoire...

    Elle finit par heurter son front dans un angle, comme une locomotive en bout de course, en douceur, avec lourdeur. Elle prit appui contre le mur. Il lui sembla que le ciel était devenu dur et froid - que derrière elle, un abîme s'était ouvert, lui interdisant tout retour en arrière.

    Elle ne bougea plus. Accroupie sur ses pensées - si seulement elle pouvait les chier! Saisie par des souvenirs brûlants qui lui glaçaient le sang, elle ne voulait plus bouger d'un pouce.

    " Ben, tu fais quoi maman ? T'attrapes une araignée ?"
    Elle va la trouver où la force de répondre ?
    Elle va la trouver où la force de le dire avec un sourire dans la voix ?
    Elle va la trouver où la force de le dire avec un sourire dans les yeux ?

    Elle va la trouver.
    Car, l'âge aidant, elle y est.

    texte de tiniak et May Nat,
    © 2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspirés par "BATHROOM STORIES 2"
    la photo du jour de NebulaskiN

  • au collet

    collier-en-agate-et-cuir-1.jpg

    agate et cuir
    comme un soupir
    d'aise à ton col est monté
    le bel empire
    du fou désir
    d'être parée

    je t'ai offert
    cette lanière
    depuis la nuque nouée
    coule rivière
    jusqu'à l'ornière
    de ta gorge déployée

    de cette offrande
    d'autres dépendent
    quand nous irons consommer
    près de la lande
    le goût amande

    de nos baisers

    agate et cuir
    seuls à couvrir
    ta vibrante nudité
    prennent plaisir
    à laisser bruire
    un écho perle et lacet
    à nos souffles emmêlés

     

     

    norbert tiniak pour May
    © 2008 DUKOUZUMIN &ditions TwalesK

     

  • astre au logis

    planete-dessousverre.jpg

    La lune est mienne
    depuis que je tiens
    entre mes mains pleines
    ton doux bas sain
    j'en contiens à peine
    la danse d'airain
    qui déjà promène
    Vulcain

    Pluton s'affole
    à l'aube venant
    sans que ne décolle
    de corps s'aimant
    aucun des deux pôles
    que nos frottements
    font à tour de rôle
    titans

    Mars n'illumine
    aucun des foyers
    de notre cabine
    toute embrasée
    quand, de nos échines
    indisciplinées
    fuse une albumine
    lactée

    Vénus défaille
    la course elliptique
    de notre bataille
    est chaotique
    et de nos entrailles
    le choc anarchique
    défie les ripailles
    antiques

    Saturne hésite
    ses anneaux vairons
    donnent de la gite
    à l'horizon
    quand mes doigts s'invitent
    en révolutions
    là où ça t'excite
    au fond

    Jupiter meurt
    en toute ignorance
    du simple et bon heur
    des jouissances
    qui viennent aux coeurs
    mis dans la Balance
    entre douce ardeur
    et transe

    Mercure accuse
    Cassiopée à tort
    d'agir en intruse
    dans nos efforts
    où ne se refuse
    rien qui nous amuse
    rien ne nous abuse
    alors

    Neptune amer
    en reste interdit
    c'est trop bonne chère
    que d'appétits
    se font sans mystère
    sous les cieux sévères
    et leur atmosphère
    meurtrie

    Uranus aurait
    des raisons de voir
    dans nos corps mêlés
    certains trous noirs
    où l'infinité
    de l'éternité
    à jamais se fait
    avoir

    norbert tiniak © 2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK