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  • limonade cænnaise

    Lèvre boudeuse, l'œil mauvais
    passe le soir à la fenêtre
    fait semblant de m'y reconnaître
    et puis, de tout son long s'étale
    sur les murs bourgeois de craie pâle
    et leurs volets
    derrière quoi le quotidien se renfermait
     
    Je sors un doigt, un bras, la tête
    Allons, faisons notre marché !
    Habillons-nous d'un air de fête
    au parapluie circonstancié
     
    (je parle à qui ? je suis seul, oh !
    …en compagnie de mon cerveau, quand même)
    C'est bon, je vais battre pavé, voir si Caen m'aime
     
    La rue, déjà, est bien en place
    J'y salue quelques pensionnaires
    aux Bon Soins de la Caponière
    aux médecines appuyées
    - ces guerres lasses !
      ces À-Quoi-Bon clamant "La Vie est dégueulasse" !
     
    D'autres gosiers, à l’Antirouille
    vident leur sac - vides, leurs fouilles...
    (l’épisode m'est bien connu
     mais, pour ce soir, j'ai d'autres buts)
     
    Libre parvis de Saint-Sauveur
    ta face crayeuse rougit
    (de loger tant d'hypocrisies ?)
    quand sonne l'heure à Saint-Etienne
    au carillon - le pénultième !
    monte l'odeur
    qui manquait au parfum chargé de mon humeur
     
    Ça me gratte, ces bottes rouges !
    et la couleur (trop à la mode !)
    des cheveux fuyant leur exode
     
    Mais au château, plus rien ne bouge
    ni la pierre que j'aime tant
    ni le persistant sentiment
    que l'abandon baille ses bouges
     
    Et ça me reprend, les fourmis
    de cette insistante mémoire 
    qui me fait chercher dans le soir
    l'amour qui m’a tout rabougri
    et qui mange
    à la sobre tablée où nul ne le dérange
     
    J'avance vers la seule preuve
    attachée toujours à ces mots
    dont je flatte le marigot
    (je parle du plus petit fleuve)
    et je l'orne
    « À vaut l’eau ! »
    de mon violent désir de miel sans borne
     
    Un chant vaudou chauffe à l'oreille
    J'arrive bientôt sur le port
    Tiens, la Tour Leroy se réveille
    au cri des mouettes sans trésor....
     
    Et te voici, mon rêve lent
    lâchant ta course vers la baie
    ‘A thrill a day, keeps the chill away!’
    J'avoue n'être pas cet amant
    gentil, placide
    triste servant de caresse livide
     
    Ah mais fourmis, vous revoilà !
    Et la nuit a rongé le soir !
    Buvons à nos conglomérats
    puisque tout se noue dans le noir
     
    Tout se noue : les voisins fantômes
    les trahisons qui se renient
    les serrements du jeu de paumes
    et les fraternels appétits...
     
    Voici le fleuve et son autel
     
    J'y suis tant de fois descendu
    la même intention retenue
    prête à jeter son apostrophe
    dans cette calme catastrophe
    - il n'est pas dit que l'on m'y rendra plus...
     
    Ici finit la promenade
    à la bordure des histoires
    à célébrer la fin du soir
    en jaugeant une limonade
    - forte! merci…
    en allusions mêlées de gris souris
     
     

    Laurence Le Masle

    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
  • Onzième nuit

    C'est bientôt la douzième nuit, ma chère alarme
    Choisis-le avec soin l'œil qui va se fermer
    Par l'autre, grand ouvert, un monde va passer
    Déjà, le Lent Demain vient déposer les armes
     
    Sur ses genoux de vieille est tombée, rousse, l'heure
    Ses cheveux colorés pissent dans les nuages
    La ville ramassée dégrafe ses corsages
    Dans un demi-sommeil, tremblent d'anciens bonheurs...
     
    « D'où m'es-tu revenu, catastrophique amour ?  »
    « Comme on t'a bien coiffée, ma sublime grand-mère !  »
    « Oui, c'est après ton sein que j'ai couru, Mystère...  »
    « Ma fille à quatre mains vient chanter dans ma cour »
     
    Les bruits de cette nuit se rhabillent d'orange
    Une idée après l'autre, un règne d'oubli croît
    Tout se résume enfin à ma dernière foi
    Au premier coup sonné, j'entends pleurer mes anges
     
    Et ça vibre là-haut, dans le ciel incertain !
    (je n'en crois pas un mot, mais c'est bon de le dire)
    Ah, ça y est ! J'ai brisé la forme et son empire
    autant y retourner, c'est toujours du bon pain...
     
    « Encore une chanson, s'il-te-plaît, ma mémoire...  »
    « Bon, le numéro neuf... Va pour la nostalgie...  »
    « De toutes, je suis veuf ! et voilà l'ironie...  »
    « J'aime tant ces fantômes, leur faconde, leur gloire... »
     
    Là, au septième coup, je ne fais plus le fier
    Avec cet œil fermé, j'ai l'air d'être imbécile !
    Je me sens égaré, en volontaire exil
    Le monde me pénètre, et c'est pas mince affaire !
     
    Une pèche écrasée me ravive la bouche
    Une vaste nuée prépare son vacarme
    Une mort annoncée n'arrache aucune larme
    Un malingre poucet regrette un peu sa couche
     
    « Bonsoir, tristes mortels aux sourires béats !  »
    « Allez ! Vous revoilà, musique et tes visages...  »
    « Quoi... ?! Je les ai signés mes plus-vibrants-z'hommages !  »
    « Ah, non ! Foin des missels au maussade nougat… »
     
    Purée sans champignons, la nuit avance vite
    Le doute qui s'invite a le goût de ta chair
    - toi, qui m'auras tué plus qu'une fois hier...
    Je garde un œil fermé sur ta larme hypocrite
     
    Par l'autre, un monde passe et me vide les sangs
    La nuit se rafraîchit, même si loin du fleuve
    Quelques belles z'amours s'illusionnent de preuves
    Leur vie, de guerre lasse, isole, incidemment
     
    « Bon, c'est bien beau tout ça, mais on touche à l'ultime...  »
    « L'aube ne viendra pas, je l'ai décommandée...  »
    « Que s'arrête mon pas, mais perdurent mes fées !  »
    « Plus rien à condamner, revenons à l'infime »
     
    Mais l'aurore déjà lève son hypothèque
    Le rêve doit finir
     
     
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    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    écrit le 24 août 2014, date anniversaire pour tous ceux qui lui furent chers et l'ont aimée.

  • Change-m'en ! songe...

    Je ne changerai rien au rythme des marées
    rien aux amours données le cœur nu sous la main
    rien à l'espoir laissé dans un regard voisin
    mais j'effacerais tout pour savoir oublier
     
    Non, que l'absurdité de l'instant ne diffère !
    Que les ors bondissant sur le fleuve perdurent…
    Que m'importe à présent la couleur des voitures…
    Puisque je n'y peux mais, comment dire j'espère ?
     
    Admettons, je le peux ! modeler l'alentour...
    J'ouvre alors sa fenêtre, en rassérène l'air
    Je recouds des matins les trop lâches revers
    J'y embrasse les yeux qui m'ont parlé d'amour
     
    Mais, si je vais plus loin - dans l'humeur assassine !
    je n'hésiterai pas à massacrer l'or rance
    ses vains salamalecs, ses hypocrites transes
    et ce qui va avec : les ardeurs intestines !
     
    Je repeins le soleil avec les mots du soir
    - tu sais, ce que l'on dit seul au monde et pleureux...
    Je dessine à la lune un visage amoureux
    que ta main dans la mienne ait un nouvel espoir
     
    Que ma main dans la tienne ait confiance - toujours ?
     
     

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    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un impromptu littéraire - tiki#219
  • immobile pugilat

    Pour ce nouveau reflet de ta belle personne
    voici l'or annoncé dans le ciel qui résonne
     
    Une ombre a dépassé l'heure de se revoir
    où la duplicité s'offre un nouveau boudoir
     
    Glisse une main plus haut, que vibre cette scène
    et sa lutte au cordeau avec les meubles chêne
     
    It lives on a fake, you see, le vilain soir
    dont tu te prémunis derrière un cheveu noir
     
    La vie t'arrache un œil, mets dans l'autre ton âme !
    depuis son vaste seuil en réchappent tes flammes
     
    Avalanche de mots, les pas dans le couloir
    tiennent dans ta photographie, dans son miroir
     
    Tu floutes les parties qui disent qui tu es
    dans les bras reverdis d'un fauteuil fatigué
     
     
     

    Gaëna da Sylva,photographie,sensuelle,nip,seat

    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour une photographie de Gaëna da Sylva
     
  • Chiffonnade

    Le regard l'un à l'autre, le rêve se noue
    tisse le brun , le roux, confectionne l'étoffe
    où s'étendent bientôt les tendres apostrophes
    qu'offre l'intimité des lèvres dans le cou
     
    L'amer s'est retiré devant la mélodie
    L'ombre étale adoucit la terre sèche encore
    Du ciel ont déserté toutes les anaphores
    La saison finissant murmure en harmonie
     
    La torpeur a figé la dernière caresse 
    Des yeux gavés, l'ivresse a joint les devantures
    - qu'ils songent de concert, ça ! je n'en suis pas sûr...
    Lentement, la journée défait sa longue tresse
     
    Voici la catastrophe - elle était attendue !
    Quelque rage incongrue file une remontrance
    Adieux, jolis matin parfumés d'espérance...
    L'histoire, tout soudain ! dégrafe ses vertus
     
    « N'étais-tu pas mon or ?! » ; « Allez, vae soli ! »
    « Où es-tu, ma partie ? » ; « Je t'aurais voulu mien ! »
    Et passe à l'écheveau le reproche sans fin
    De ce qui fut certain, l'idée s'évanouit
     
    Voici qu'un vieux matin se cherche des raisons
    d'engranger les blasons qui traînent dans sa cour
    Dévidant la saison, le rouet n'a plus qu'un tour
    Mieux vaut mettre les mains sur un autre chiffon
     
    Mais comment terminer - en rimes féminines
    dans un quatrain ouvert, mes troubles appétences
    quand ce que j'ai chéri a le goût de l'or rance
    qui m'a rongé le songe et défait la bobine... ?!
     
     

    Laurence Le Masle

    tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK