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littérature - Page 10

  • tango-panaché

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    à mes potos qui se reconnaîtront...

    TANGO PANACHE

    La brume avait déserté le quai avec les entrées maritimes, mais pas nos esprits vaporisés au houblon, au malt à whiskey et à cette petite mirabelle de derrière les fagots que Pat' La Patron nous servait à rideau tiré. Bien malin qui de nous eût été en mesure de dire avec certitude de qui nous fétions l'anniversaire depuis la veille au soir. Même s'il s'était agi de l'un d'entre nous, je pense qu'aucun n'était plus en capacité de donner sa date de naissance avec exactitude ; mais cela n'avait plus d'importance, à cette heure à peine matutinale, les contrôles de police ronflaient dans les guérites - et le rideau avait été tiré depuis belle lurette. Pat' La Patron tenait à sa licence et nous n'étions pas friands de contredanses. Une franche connivence, un rien pirate, solidarifiait donc nos joyeuses déliquescences. Le tout sous l'oeil pas moins vaseux que le canal proche, de La Patron.

    Un client plus vieux d'un an avait payé une ou deux tournées de trop et nous avions fait le grand écart en levés de coude : six heures du soir, six heures du mat'.

    Michou La Barrique, fort gaillard dont la stature préventive avait évité bien des déconvenues à notre petite troupe noctambule, Le Michou regardait ses pieds en marmonnant un gargouillis d'où perçaient dans les aigus les accents d'un rire obstiné. Fred, grande gigue au poil roux, s'en aperçut le premier et nous le fit remarquer. Nous nous étions tous mis à glousser, qui dans son verre, qui dans ses doigts, mais Michou demeurait imperturbable. Ce fut Pat' La Patron qui l'entreprit :
    " - WoOp, Michou! Où tu vas où, avec tes pieds comme çaps ?"

    Elle frappait fort du talon, la mirabelle de La Patron. C'est pas pour rien qu'on l'appelait "la claquette". Outre qu'elle vous en fichait une bonne, si vous la descendiez cul-sec, vous étiez instantanément pris du tic de l'hidalgo. Fred "Redhead", interne de médecine de son (autre) état, nous expliqua une fois le pourquoi du comment de ce réflexe qui agissait comme une pompe de secours pour le coeur : partant d'une contraction du mollet, le martelement du talon sur le sol provoquait une vibration compensatrice des effets du tord-boyaux sur la dilatation des vaisseaux (sic).

    La Barrique cambra son blase un poil trop haut, si bien qu'on ne voyait plus, en place de ses yeux, que ses narines.
    " - Mes banards ont la mougeotte, bredouilla-t-il. Si on allait 'oir ouskon pourrait se dégouhir les pattes, mm ?"

    Un bref silence dubitatif suivit cette courageuse tentative de nous arracher à nous tabourets de zinc. Comme toujours dans ces cas-là, c'est Le Fox qui trouvait une échappatoire, médiane ou oblique, selon.
    " - Mais en voilà une idée qu'elle est bonne, hein Pat' ? Si on faisait un peu tourner ton joute-bok, dis voir."

    Pat' La Patron ne se fit pas prier, sa caisse attendrait. Pat' n'était pas peu fière de son antiquité bichonnée dans sa famille depuis les années cinquante. Une passion héritée de son  beau gosse de père, danseur hors-pair dont le film favori était "On achève bien les chevaux" ; pour dire. On l'avait enseveli selon ses voeux  avec la B.O. en fond sonore et, après avoir jeté une poignée de terre et un DVD sur le cercueil modeste, le cortège avait dû exécuter quelques pas de deux, une fois la tombe recouverte.
       Une danse qu'on ne refuse pas, celle-là.
      Avec ça, depuis qu'elle avait découvert ce merveilleux produit qui vous ressucite un vinyle en deux coups de chiffons, les vieux standards de La Patron s'en trouvaient tout ragaillardis. Pat' ne ratait jamais une occasion de se payer un petit Rock'n'Roll ou deux. Lolo, sa compagne et elle, se lançaient parfois dans des figures de rock acrobatique qui laissaient tout le monde sur le cul.
      Une volée de jetons et quelques programmations hasardeuses plus tard, ça tonitruait sérieux dans les esgourdes.

    La Barrique voulu sans doute amorcer une figure de style, genre tango panaché... mais question panache, son salto arrière s'acheva aussi prématurément que fort heureusement dans une des banquettes molletonnées. L'instigateur de tout ce raffut était forfait dès l'intro du second titre. mwof! Ben  La Goule, sorti de sa morgue trompeuse, partit dans une imitation des commentaires de Nelson Montfort et Philippe Candeloro, tandis que le bal se mit en branle.

    La Patron aimait bien danser avec moi. Etant gaucher et plutôt gringalet, cela lui facilitait la tâche pour conduire et placer un de ses portés inénarrables. J'éprouvais chaque fois la même émotion grisante de ne plus savoir qui que quoi dont est-ce et d'en être tout à fait heureux. Il y avait aussi cette spirale folle qu'elle me faisait faire autour de ses hanches, sous sa poitrine ; ça aurait pu durer des heures, pour moi, j'étais aussi confiant qu'un nourrison. Et puis, il fallait bien toucher à nouveau le plancher des mouettes.

    Comme souvent, avec ce qu'elle avait dépensé d'énergie, La Pat' s'écroulait dans un coin de son bar. On connaissait le protocole. Un étrange ballet s'organisait alors, chacun assumant sa partie. Dans une chorégraphie à la Bob Fosse (le juke-box tournait toujours), les volets étaient vérifiés, la caisse planquée, le ventilateur coupé, une fenêtre ouverte, La Pat' couverte, le coup de chiffon donné sur les tables (on ne touchait pas au zinc, woulla!), la chasse-d'eau tirée... puis nous sortions par une porte dérobée, troupe de rats sur les pointes.

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    tiniak ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    impromptu littéraire - tiki#17.
  • pour lettre morte

    La mort... au violon!

    aujourd'hui oui, La Mort est morte
    je l'ai tuée d'un trait de plume
    elle a voulu forcer la porte
    où s'entassent mes amertumes

    ayant tenu pour lettre morte
    chacune de ses invectives
    j'avais prévu de l'Être Morte
    une visite intempestive

    elle est venue, c'est chose faite
    et ne reviendra de sitôt
    qu'on ouvre à nouveau l'oubliette
    où je l'ai jetée, au cachot!

    elle est venue, La Péremptoire
    comme si tout lui était dû
    je l'attendais à l'écritoire
    lisant L'Etranger de Camus

    " Ouvre, tiniak! Voici ton heure... "
    déclara-t-elle avec emphase
    à dessein et l'esprit frondeur
    je relus la première phrase :

    tiniak : - C'est dit : "Aujourd'hui, maman est..." 
    L'Être Morte : - ...morte ? Ah ça, non! Je le saurais!
    tiniak : - Si fait! Vois, c'est écrit ici!
    Lis-le, toi...
    L'Être Morte : - ... ça m'est interdit.
    Qui le prétend, donc ?

    tiniak : - L'Etranger.
    L'Être Morte : - D'entre vous, pour moi, nul ne l'est.

    tiniak : - Je n'invente pas celui-ci.
    De cela me fais-tu crédit ?
    L'Être Morte : - Certes, Poète présomptueux.
    Te figures-tu être Dieu ?
    tiniak : - Connais pas!
    L'Être Morte : - Ah oui, j'oubliais.
    Qu'importe! Il est temps d'y passer.

    tiniak : - Pas aujourd'hui...
    L'Être Morte : - Ouvre la porte!
    tiniak : - Pas aujourd'hui... "Maman est morte".
    L'Être Morte : - Fadaises! J'en suis seule comptable!
    tiniak : - Je dis, moi, que c'est véritable
    et que si je peux le prouver...
    L'Être Morte : - Et quoi ?!
    tiniak : - ... c'est toi qui passerais
    à la trappe, dans l'oubliette
    que je cache sous ma banquette.

    L'Être Morte : - Me proposes-tu un pari ?
    tiniak : - Exactement.
    L'Être Morte : - Alors, c'est dit.
    tiniak : - ... que s'il est bien vrai...
    L'Être Morte : - Oui! Oui! Oui!
    tiniak : - ... comme est écrit...
    L'Être Morte : - "Aujourd'hui...", oui!
    tiniak : - ... que "Maman est morte"
    L'Être Morte : - Allons, finis!
    tiniak : - ... tu me laisses donc la vie,
    passes la porte et tombes en oubli ?
    L'Être Morte :
    - ...sinon, je t'emmène : c'est oui!

    j'ouvris tout grand, porte et ouvrage
    puis la trappe sous ma banquette
    où dut entrer, pestant de rage
    La Mort au fond de l'oubliette

    il m'a suffit d'un incipit
    (assez fameux, convenez-en)
    pour me débarrasser bien vite
    de cet ultime inconvénient.

    mortalité infantile :

    s'il peut savamment recourir
    à la culture et ses trésors
    dans un jour peut être à venir
    L'Homme aura raison de La Mort

     

    tiniak ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK 
    impromptu littéraire - tiki#16

  • dominicale

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    c'est déjà dimanche
    et ma page blanche
    n'en finit pas de lorgner
    du côté de mon clavier

    et ma souris grise
    n'en fait qu'à sa guise
    pour tromper l'ennui
    de devoir attendre la minuit
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    j'ai mis dans le creux d'un coude
    une poignée de doigts qui boudent
    j'ai dans le coin du cerveau
    un paquet de rimes en trop
    je regarde l'écran noir
    avec le secret espoir
    qu'il va avaler le temps
    que minuit c'est maintenant
    et qu'il vient me délivrer
    la commande à honorer

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    (j't'en fous, oui!)

    ah, vraiment je n'y peux mais
    il me faut bien patienter
    ah, vraiment je n'en peux plus
    d'attendre les
    Im-prom-ptus

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    tiniak le niak(ouèèèèè!) 
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    ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
  • soleil chiffon

    peinture : Joëlle CHEN
    toile d'un jour qui cherche son nom
    près d'un soleil chiffon
    écrin de nuit où l'eau de pluie
    dans la lumière boisée dore
    du petit jour l'âpre décor
    timide
    murmure encore humide
    sous la verdure en putréfaction
    fait un semblant de brume
    et ma nuit d'amertume
    s'évade à reculons


    tiniak ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré de "Toile d'un jour..."
    une oeuvre de Joëlle CHEN

  • Lohengrin

    BaconAutoportrait.jpg(hh-hh, hh-hh) je finis ma course de retour des Impromptus. hh-hh hooou! deux secondes, je ferme la porte, me débarrasse de mes nippes et je suis à vous.

    brrr, non seulement ça pèle dehors, mais j'arrive tout droit de la note de L'arpenteur d'étoiles, écrivant impromptu et administrateur dudit espace dédié aux scribouilleurs multiazimutés. eh ben, je me demande ce qui du froid ou de cette lecture me laisse encore des frissons dans l'échine, vé!

    je ne vous fais pas lanterner plus longtemps, déjà que je suis pas en avance (...!... non, je sais pas pourquoi, j'ai dit ça,... l'habitude). voici de suite, le vif du sujet. il s'agit d'un passage extrait du coeur même de la note que l'arpenteur d'étoiles a produite sur le thème "pseudo", en cours, cette semaine. pour en apprécier le début (savoureux) et la fin (cataclysmique), vous voudrez bien faire le chemin par vous-même, hein. merci pour lui.

    illustration : Francis BACON, autoportrait

    allez hop! lecture...

    _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

    L'arpenteur d'étoiles, sans titre
    impromptu littéraire publié le 25/11/2008.
    (extrait à la dérobée)

    [...] 

    - ne partez pas tout de suite, répliqua la voix douce … que diriez-vous de « Lohengrin »

    Le jeune homme s’arrêta, interdit « comment pouvez-vous savoir ? »

    - je vous l’ai dit. Je perçois tant de chose dans ma presque nuit. J’en ai vu tellement défiler ici qui sont repartis avec leurs petites personnalités éteintes ou au contraire bien rengorgées. Mais vous, vous les dépassez tous. Lohengrin cela vous ira bien. Cela flattera votre ego, vous ramènera à ce que vous croyez être les origines de votre histoire familiale. Le chevalier au cygne, pensez donc ! Mais quel orgueil vous habite donc ?
    - la fierté de mon peuple vieux fou. Celle de ma race.
    - ce nom te convient-il, jeune homme ? Je crois que oui. Alors je vais te faire un dernier cadeau.
    - je ne veux rien. Dis-moi ce que je te dois et je m’en vais.
    - mais c’est ce cadeau que tu me dois justement … Il frappa dans ses mains.

    Deux hommes sortis de l’ombre saisirent le jeune homme et l’attachèrent prestement sur un fauteuil. L’un deux releva la manche de son bras droit. L’autre ouvrit une petite mallette et commença à préparer les instruments.

    - ne me touchez pas, vous êtes des malades, vous ne savez pas à qui vous avez affaire. Il criait et pleurait à la fois.
    - mais si bien sur que nous le savons.

    [...]

    _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

    ça caille, hein ?
    eh ben, la suite c'est 'core pire! 

    à suivre donc chez LES IMPROMPTUS LITTERAIRES, hop!

    SIM_PAN.JPG
    et pi tiens, L'arpenteur! ça, c'est cadeau [clic]

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    allez, vé!
    tisane pour tout le monde, c'est moi qui régale. bon, s'il y en a des de partants pour un chocolat chaud, de toute façon, je m'en fais un, alors.