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littérature - Page 7

  • pointes fines

    J.P. Ouvry (2006)

    l'ombre ne tiendra pas plus qu'un point à la ligne
    le début et la fin confondus en un signe
    improvisent en chœur un sommet de figure
    qui cherchera du cercle en vain la quadrature

    la fuite s'est offert une autre échappatoire
    par le biais d'un revers coulant à l'horizon
    sur le fleuve qui draine un rais de vase noire
    où frémit des oiseaux le vol en rigodon

    la chambrée s'assagit d'un coup à la commande
    il flotte encor dans l'air des bribes de guirlande
    le sourire éclatant des oreillers s'affole
    il faudra tout remettre en ordre pour l'école

    patiente, déchirure à ma jupe de laine
    la fibre maternelle entame un bel ouvrage
    après son va-et-vient tu seras moins vilaine
    je n'aurai plus de croix que sur mon beau corsage

    si je pointe à la ligne un autre indicateur
    point de fuite au tableau que souligne le doigt ;
    là, point d'ordre nouveau ni aucun point de croix
    mais j'y veux mettre à jour un dernier point d'honneur :

    dénoué d'outre-songe où je suis mieux habile
    j'ai plaisir à lier ce tissu de mensonges
    à toutes ces pensées que le verbe prolonge ;
    y ai quelque amitié mandée au bout du fil.

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

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    tiki #32 - texte versé en contribution hebdomadaire au site des Impromptus Littéraires où je vous recommande aussi vivement celui de Joe Krapov

    ainsi que ceux de Sandy, Shivaya-Warduspor, Stipe et Poupoune.

  • pas finir

    c'est là, notédis, mon dit, entre nous soi dit
    tu sais, je ne veux pas finir
    comme ce très cher Paul, au pire
    (chez les figures monstrueuses !)

    que j'aime mieux la vie au chant
    heureuse, heureuse, obstinément
    comme je l'aime soi disant
    éclat riant devant la Gueuse

    dis aux gênes que le tonneau
    déverse de mon sang le flot
    pour en partager le nectar
    avec le sel et le bâtard

    mon autel est un océan
    abîme où sombrent les négoces
    anthropophages et féroces
    sous le trait muet du couchant

    ceci dit, revenons au vide
    et à ce choix qu'il nous propose
    d'aller contempler sa nécrose
    ou de le combler d'impavide

    car j'aime mieux la vie au long
    d'aventureuses obsessions
    signer d'une main l'autre au con
    une rime libidineuse

    alors, c'est dit ? pas vu, pas pris
    parmi ces mille oiseaux en vol
    rester celui qui batifole
    et pépie le bel aujourd'hui ?

    sur ma vie, oui.

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK 

  • ...ni vos cm2 !

    Thieeerry La Fronde est un imbécile!!

    « Apeu tiprinceujé compri peua peu ainsitapetite vie mmé mécan mélan coli que. »

    Oh putain naaan !
    au nom de la loi des séries14h15, heure mortelle en CM2. La récré est encore loin. Le repas du midi fait une boule dans l’estomac qui veut pas descendre plus bas. Mon voisin pue la sueur - il sort son ballon de foot à chaque récré, et la récré du midi, elle est loooongue ! Et, souffrance, la séance de lecture à voix haute commence par Fostino, arrivé d’Espagne il y a deux ans du haut de ses douze-ans-bientôt-treize-et-soixante-kilos-pour-un-mètre-quarante.
    Pour mon voisin, Steve – qui n’a rien de Joss Randall ! l’est bien pratique Fostino. Assis devant nous, sa masse lui permet de copier méthodiquement et sans vergogne sur mes propres interrogations écrites. Souffrance accrue.

    « Tuahulair très… très… surprida boré puitua rideu toim… rideu… toi-même. »

    Et merde !

    Il n’y a pas que la récré qui est encore loin. Les vacances de février sont tout juste derrière nous, alors celles de printemps… un rêve de chocolat blanc, de peinture sur coquille d’œuf et de chasse dans les terrasses de la maison de Bandol. Un rêve qui a bien du mal à se frayer un chemin dans le brouillard normand, brouillard givrant qui s’insinue en frissonnant sous les vêtements et vous poursuit la vie jusqu’au bain du soir.
    Les radiateurs aussi sont bien loin. On repeint nos classes. Du coup, nous sommes installés en transit dans un baraquement. L’infâme baraquement des CPPN, ces nuls, ces pirates de la récré qui ont eu droit à un séjour en classe de neige, eux, les salauds.

    Février, c’est le mois de ma moitié.
    J’ai ma demie passée. La demie de mes neuf ans. Je suis le plus petit de la classe, en taille, en âge et en attitude. Bon élève binoclard, fils de parents divorcés, fils de parents enseignants, métissé d’antillais qu’on dirait maghrébin, j’ai le profil bas chevillé au cartable. Alors je traîne pas trop dans la zone investie par les garçons, les vrais, à la récré.

    « Maissur tassipeu titeu pla nèteu, ilteu su… il teu suffi zèdeu tiréta chaizeu dede quelques… pas »

    Mais il y a les filles du préau !
    Et ça, les filles du préau, c’est du soleil sous la cagoule.
    J’aime leurs jeux : la corde, le foulard, les jeux de mains… Ah, les jeux de mains et leurs comptines ! Je les défie à l’élastique. Je suis très bon à ce jeu. Même, je les laisse pas gagner à tous les coups. Juste quand il y a Mon Isabelle, avec ses cheveux d’automne flamboyant, ses yeux vert d’eau, ses joues picorées de rousseurs sous les lunettes à écailles marrons et ses jupes quoiqu’il arrive – sur d’épais collants de saison, roses évidemment. Mon Isabelle, je la laisse toujours gagner.
    On habite la même résidence, mais elle, deux blocs plus loin.
    On rentre ensemble. On parle de tout. Et ça commence toujours, au petit matin, par le dernier épisode de Quentin Durward. C’est pour ça que c’est Mon Isabelle, alors que Myriam, elle s’appelle. Moi, je suis Son Bon Quentin. Je la défends, des fois, sur le chemin de l’école, quand des brigands surgissent d’une haie, quand des vilains assaillent notre cage-à-poule carrée. J’en oublierais presque mes petits frères et sœurs, et la sienne de sœur, s’ils n'étaient pas bien commodes pour prétexter de longues après-midi de samedi partagées, placées sous la responsabilité des deux aînés que nous sommes, pour le plus grand bonheur (économique ?) de nos parents respectifs.

    Le mieux, à cette époque, c’est les couchers de soleils à portée de regard.
    Ils tombent juste à point avant de rentrer pour le repas du soir. Et ça nous fait des pauses mélancoliques au sommet de notre cage-à-poule-donjon.

    Et merde, à moi déjà ! Putain merde, on en est où ? Vite ! Ma mémoire auditive… Vite la ligne… Oui oui, m’sieu, voilà :

    « - Tu sais… quand on est tellement triste, on aime les couchers de soleil… »

    T-puni!

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

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    paru chez les "Impromptus littéraires" - tiki#21
    où je vous recommande aussi les textes de...

    Basdecasse et L'Arpenteur d'étoile ;
    Toncrate ; SaraLine et Jimi Mumei.

  • un déjeuner dans les étoiles

    not' ?

    j’ai décidé

    dans les étoiles

    chaque jour de mettre les voiles

     

    pour te retrouver, ma si reine

    je m’y élance à perdre haleine

    avant que la nuit soit complète

    j’y vole à en perdre la tête

    et chevauchant le Sagittaire

    je prends congé de notre Terre

     

    j’ai dessiné

    dans les étoiles

    un grand plumeau-bateau à voiles

     

    pour t’y promener, ma si reine

    le bois de santal et l’ébène

    assureront notre confort

    nous cueillerons des bulles d’or

    accrochées à la Voie Lactée

    pour notre petit-déjeuner

     

    avec le ciel pour couverture

    notre lit est une aventure

    qui s’étend jusqu’à l’infini

    de nos nuits

     

    quand, sous cette voûte céleste

    notre vaisseau lâche du lest

    c’est pour embarquer avec lui

    l’aujourd’hui

     

    dans l’obscurité chaleureuse

    j’embrasse ta bouche rieuse

    ainsi renaît de nos amours

    chaque jour

     

    et vous, qui regardez le ciel

    toi pour qui la nuit est si belle

    toi qui va poursuivre sa route

    toi qui voudrais t’ôter d’un doute

     

    avez-vous choisi quelle étoile

    éclat brillant sur la Grand Voile

    donne le cap à vos désirs

    largue l’amarre du plaisir

    et vous offre un monde à délire ?

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    illustration composée d'après

    une photographie de Gaëna Da Sylva 

     

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    paru chez les Impromptus Littéraires - tiki#20

    où vous pourrez apprécier aussi les textes de :

    Joe Krapov

    et Toncrate

    et puis, il y a l'Arpenteur d'Etoile qui s'imposerait de soi

    pour le thème en cours ("dans les étoiles")

    mais il m'a vraiment fait un coup que bon... 'vous laisse découvrir.

  • Quand les murs m'eurent

    ah, dure! dure...

    Aurais-je la tête aussi mur que ce rude en-tête, je ne serais pas encore assez mûr à la douleur qui perdure et reflète nos tristes mirettes.

     

    J’en vois la mousse tachue baver sur nos emplettes, tandis qu’un mousse-tâcheron s’en va conter buvette en rade de Bluette ;

    et là, je dis : mon cul !

    et ne vois déjà plus que poudre d’escampette !

     

    Mais, liesse impromptue, l’une ou l’autre sauvage

    s’arrache des vertus comme on perdra courage

    à dire la détresse que pierre porte aux nues.

     

    Farce de l'une ! Dépit de l'autre ! 

    Les murs ont des oreilles… qui en salvent bien plus.

     

    Et tandis qu'on se vautre

    j’envoie le moustachu chercher des noisillons

    il n’en reviendra pas, Médor !

    Le mur a déraison pour unique trésor.

     

    Et c’est le carnaval qui pleut ses rires gras

    et c’est la ville entière qui veut marquer le pas

    sans connaître l’effort

    de ce Maître d’Accord qui la regarde, allez

    pour cette fois encore

    menée à la braguette

    suivre sa démesure

    descendre vers le port.

     

    Ils sont beaux, les mouvants !

    On dirait des corbeaux qui jouent les cormorans.

    Et ça cause et ça braille

    ça claque des marmailles qu’on avait crues couchées

    mais ça piaille et ça glose et ça court dans les rues

    et plaide ses lauriers aux frais de plus ventrus !

     

    Et puis, quand tout s’étiole

    c’est le joug qui rigole

    engageant sa partie

    les machines de fer aux sinistres machoires

    s’en vont casser des pierres l'impertinent miroir.

     

    Les murs qui ont parlé se font tirer l’oreille

    et ceux qui se sont tu seront brisés pareil.

     

    Alors, à cet endroit ou la bouche mollasse

    a fait la fine bouche ignorant la menace

    un œil aura suffi pour en garder vivace

    la trace tenace.

     

    Que semblait donc nous dire ce dur-en-tête-à-cuire ?

    «  Mettez les mains au mur pour mieux les soutenir

    mais pour ne pas tomber, n’écartez pas les jambes ! »

     

    A grandes enjambées s’avance en dithyrambe

    la sentence annoncée de la partie adverse :

    «  Défense d’afficher aucune controverse »

     

    Si j’avais de l’enduit…

     

    Voici qu’un frais janvier annule un doux décembre

    et ce n’est pas du miel que l’on boit, c’est de l’ambre

    et du plus bel encore

    de ceux qui ont fiché dans leurs gouttes dorées

    les restes pétrifiés de monstres du passé.

    Boirez-vous la tisane ?

     

    Et là, je dis : mon œil !

    Je ramasse une pierre

    et regarde alentour pour la jeter en l’air.

     

    Elle ne tombera pas, couillon !

    C’est un mystère.

     

     

     

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    saisi au collet par l'oeil de Joe Krapov

    promenant sur la ville de Rennes.