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Gaëna

  • Aux jours de pluie

    (à Gaëna da Sylva, photographe)
     
     
    Les jours de pluie
    naît le conflit
    de souhaiter que la vie s'achève
    et de nourrir autant de rêves
    que d'aventures,
    que l'oubli - sa déconfiture
    épand sur de trop larges grèves
    pour la conscience d'être ici
    à l'ouverture
     
    Pleurez, nuages
    tous vos mirages
    il me reste un songe, certain
    qui me va de l'œil à la main
    et me reforge le courage
    d'aller coucher sur le regain
    puiser sa force de partage
     
    D'un chapeau mou
    d'un blanc genou
    d'une parure surannée
    je formule un nouveau projet
    de mascarade
    en caresse la promenade
    et travaille mon déhanché
    pour balancer de bout en bout
    quelque bravade
     
    Chantez, rivières
    aux arbres fiers
    les ricochets du bon regard
    que décoche mon avatar
    Comme en vos reflets, éphémère
    à la rencontre du hasard
    je lance mon pas sur la terre
     
    Cesse la pluie
    passé l'ennui
    la vie logée aux commissures
    de mon sourire en aventure
    j'en viens au rêve
    que jamais la vie ne s'achève
    Tant que j'en ai l'investiture
    et la conscience d'être ici
    lumière et sève
     
     gaëna da sylva

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    (illustration graphique composée d'après des photographies de l'album (FB) "Les jours de pluie" de Gaëna da Sylva)

  • Des ordres, ménager

    Gaëna da Slyva, photographe

    La maison est en ordre -intérieur et contours
    Permettez que d'un trait j'en caresse l'espace
    un moment, l'aujourd'hui :

    Son histoire est en paix; n'y manquent pas l'amour
    avec ses peaux cassées roulées dans les tiroirs
    ni les cheveux défaits en vagues de velours
    proprement dénoués aux fenêtres du soir
    dans l'écho mollissant de ses derniers tambours
    ni la pâleur des murs auréolés d'absence

    L'escalier peut grincer des dents sans déranger
    le mobilier chiffon sous son drap de poussière
    il a les pieds moussus, les charnières rouillées
    il a le sommeil lourd des castes ouvrières
    qui auront bu leur soûl, devant s'en contenter
    à défaut d'avoir jamais eu remplie la panse

    Le salpêtre a gagné, allant de pièce en place
    sur le vieux tabac gris, le graillon de cuisine
    les cuivres au Miror luisants comme la glace
    les rares sels de bain chipés à l'officine
    le charbon, la lessive et la boue des godasses
    Le temps n'a pas de nez; c'était perdu d'avance

    Le brun mange le jaune et la nuit s'en défend
    - c'est l'œuvre du soleil la ruine des couleurs !
    comme fane un genêt privé de l'eau des champs
    au papier a déteint l'arrogance des fleurs
    maintenant qu'elle peint tout selon son humeur
    s'oblige la mémoire à quelques indulgences

    Le visage envahi par une barbe rousse
    au-dehors, la maison fait un peu sa coquette
    mais ses volets cernés qu'aucune main ne pousse
    trahissent les assauts récurrents des tempêtes
    A deux pas, le manoir, à peine pris de mousse
    ne semble pas navré de cette dépendance

    La maison est en ordre -intérieur et contours
    Un parent m'y lisait La Vie est dégueulasse
    comme on déguste un fruit

     

    tiniak © 2011 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#135

    Illustration extraite de
    © LA CHAMBRE NOIRE de Gaëna Da Sylva, photographiste.

  • voilette, nos hiers

    Gaena_voilée.jpg

    L'étoile qui l'inspire et cette autre, et cette autre
    volettent, halètent, puis leurs souffles l'emballent
    et font de cette nuit qui vire au linge sale
    un écrin vaporeux

    (je me crème les yeux de nuées sidérales)

    Elle entoure d'un voile éthéré sa charpente
    - voudrait-elle masquer comme elle est, périssante ?
    et se tient accroupie comme une vieille dame
    indigne de son âme et fuyant son état
    de peur qu'on n'en découvre tout l'insigne drame :
    un mollissant éclat de sa carne apparente

    Oh, mais je la vois, moi qui n'ai d'yeux que pour elle !
    Je sais comme elle est, nue; je sais comme elle est belle
    ayant à ses liqueurs profondes pu goûter

    Et quoi ! on ne meurt pas de voir la mort venir;
    on y gagne plutôt le plaisir d'exister
    Le ciel est un lointain ami qui peut nous dire
    merci du coin de l’œil d'être à le contempler

    Et puis, d'un voile l'autre, à tout prendre, aucun d'eux
    ne m'est plus attrayant ni même délicieux
    que celui que tu portes pour te mettre en scène
    avec, rappelle-toi, ces petits bas de laine...
    avant de nous rejoindre en sublime jeunesse
    ta main fraîche à mon ventre et la mienne à tes fesses

    Voici de nos hiers le sang ravigoté
    Éteignant un à un les lumignons célestes
    nos ahans enhardis ne seront pas en reste
    au déclin annoncé des espaces nocturnes
    quand le vent du matin aura tout ravagé
    affolant les rideaux mêlés de notre turne.

     

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    illustration issue de LA CHAMBRE NOIRE
    (Gaëna Da Sylva, photographe)
    pour un impromptu littéraire - tiki#69

  • porte close feinte

    Porte close vibre

    Oh ! mon amour, mon bel amour
    viens, je t'en prie
    et vois ce que j'ai là pour toi
    ce que j'ai pris

    Elle est à toi comme jamais
    je ne le puis
    c'est une tendre fleur des bois
    que j'ai cueillie

    Porte close geint

    Oh ! mon amour, mon bel amour
    veux-tu entendre
    de ma douleur le chant qui te dit
    viens me prendre

    Oh, mon seigneur ! Oh, mon malheur !
    Oh, ma lubie
    ne reste pas aveugle et sourde
    à ma folie

    Porte close nuit

    Oh ! mon soleil, mon doux réveil
    mon cher festin
    vois combien mon souffle est pareil
    à ton destin

    Oh, mon idole ! Oh, mon école
    des Enfers
    poison de mon sang qui s'affole
    je t'espère

    Porte close feint

    Ah, mon fidèle ! Ah, mon cruel
    te voilà donc
    Ah ! mon néant, tu m'ensorcelles
    Cupidon !

    Ah, mon bonheur ! Ah, mon ardeur !
    Ah, ma furie !
    Ah, mon adorable grenouille
    au fond du puits.

    Gaena_please.jpg

    ------------------------------------------------------
    (à paraître dans l'abécédaire poLétique)

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré par les photographies de Gaëna Da Sylva
    extraites de sa CHAMBRE NOIRE 

    grenouille_granit.jpg
  • racines

    Rêves, racines de l’étrange
    Amassant patiemment de mon tourment la sève
    Coulez, ma trêve orange
    Immuable à la source
    N’ayez jamais de cesse
    En cette longue course, d’être
    Serpentins sous la mousse, mélange

    Dais d’albâtre laiteux
    Ecoute-les hurlant

    L’antique plainte à l’orée du dédale

    Embrassez-moi, mes songes
    Terriblement
    Ramarrez cette longe
    Au moindre dénuement de mes vœux dépolis
    Nœud de mélancolies
    Gigognes insatiables
    Ebauche-moi des nuits noires et véritables

    ________________________________________

    tiniak ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré par une photographie de Gaëna Da Sylva
    extraite de sa CHAMBRE NOIRE

     

    bonus onirique :

    photographie : Gaëna Da Sylva
    (la Dame des Bois de Gahenne)