Présomption :
Oui, ça va, j'en conviens
j'ai lâché tous mes chiens
après le père et sa pucelle
pour aller tirer l'hydromel
au fût de la mère interdite
en jouissant de sa chair maudite
sans plus penser à rien
ni à mal ni à bien
Et la présomption d'innocence ?
c'est pas fait pour les chiens, je pense.
Ah mais d'accord !
vous me jugeâtes déjà sur pièces
il n'est que de passer à la caisse
au bout du corridor ?
Ah oui, mais... bon, d'accord.
Et l'on m'accuse de quoi, ma belle ?
de forfait contre le réel ?
et c'est un délit, ça ?
je ne le savais pas
Oui, nul n'est sensé ignorer nia nia nia
il se trouve que je ne le savais pas
quand bien même je n'y porterai pas foi
allons, condamnez-moi
et qu'on en reste là.
Ah oui, mais attendez !
...faute avouée à demi pardonnée !
vous me devez la moitié d'une peine
et n'étant pas vilaine
un baiser de vous peut vous en amender
Justine, voulez-vous m'embrasser ?
; supputation justiciable ou prétention exagérément orgueilleuse.
- et la mer au matin comme une présomption de l’esprit [Saint-John Perse].
Quête :
- Grotte Alors !
maugréait Minotaure en s’arrachant les cils
Plus j'entends son babil, plus il paraît certain
qu’Ariane m’embobine
ou bien ?
Comme à l’accoutumée, Thésée ne disait mot
mais n’en pensait pas moins, le salaud !
Il fredonnait par les narines :
Je te tiens, tu me tiens… et sur sa banquette
quel nigaud! le héros oubliait sa quête.
- Bon, et moi ? s’écria la mythique Ariane
épluchant, sans les dents, sa peau de banane.
- Toi ? salope !
- Nyctalope !
s’écrient de concert
le génie mal fini et son preux compère.
Ariane fort dépitée
se cura les trous du nez
découvrant, pour sa gouverne
qu’au plus profond des cavernes
un émoi platonicien
l’attendait sur le chemin.
Qui eût prédit que cette morve
pût la distraire de sa morgue
- et que cela ne rime à rien
qui s’en souciera jamais, tiens !
; sollicitude ou sollicitation, c’est selon le livre.
- J'allume du feu dans l'été, / Dans l'usine je suis poète ; / Pour les pitres je fais la quête, / Qu'importe ! J'aime la beauté [Charles Cros].
Rouge* :
A portée de regard, célestes, légendaires
elles sont devant moi les marches de Yu Gong
taillées à même le roc sur les pas de Kui Fu
entre le vieux Taihang et le rustre Wangwu
et le souffle me manque à fouler cette terre.
Je vous entends railler - comme autrefois Zhi Sou
se moqua du vieillard attaquant ses montagnes,
vous qui baignez vos pieds dans la rivière Han
en rêvant de loisirs sur notre mer Bohai,
vous me tenez pour fou.
Elles sont pourtant là, réunies sous la lune
qui vient de s'arracher à la verte lagune
et je monte vers elles
qui sont l'Eternité
rouge et dorée.
Je ne sais qui m'attend - peut-être une sirène ?
il n'y a dans le vent plus rien qui ne m'aliène,
j'en épouse les ondes.
La pente n'est pas forte et mon pas leste encore ;
deux génies bienveillants ménagent mes efforts
et m'accueillent au ciel
où je suis convié
à demeurer.
Je vais dire mon chant sur la source de Han
aimer d'un même élan le sacré, le profane
et embrasser le monde.
; ce que le vin dicte au populaire qui se le met au front.
- Les repus ont le rouge aux yeux. / Et cela fait songer les gueux [Louise Michel].
* poLèmes précédemment parus sur pavupapri
________________________________________________________
retour au SOMMAIRE DE L'ABECEDAIRE
tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK