I
 d'où viens-tu déjà ?
 de chez La Tisseuse
 que vis-tu là-bas ?
 j'y vis la fileuse
 tisser au cordeau
 liant les anciens
 avec les nouveaux
 des liens, des liens
 des liens au kilo
 et là, tu fais quoi ?
 je ne reste pas
 je file, je file
 ne me retiens pas
  
 II
 cesse de t'agiter, moucheron, moucheron!
 car si tu veux trouver réponse à tes questions
 il faudra te poser un moment quelque part
 as-tu vu au plafond, vibrante, cette toile ?
 la vois-tu seulement briller comme l'étoile
 ou n'y vois-tu jamais que stérile abandon ?
 approche, approche donc, moucheron! et regarde :
 multiazimutée, sa trame en extension
 prolonge l'existence ; mais les adéquations
 qu'y composent les sens en cercles concentriques
 assurant sa portance aérodynamique
 ne pourraient résister au moindre courant d'air
 sans le don singulier, ce talent de l'épeire :
 créer l'éternité au coeur de l'éphémère.
 moucheron, mon ami, tu chercherais en vain
 la clé de la figure au centre de l'ouvrage
 observe bien ces liens, vois comme le tissage
 subtil et magistral, à peu de choses tient
 dans la fragilité de tous ces filaments
 la transversalité de son rayonnement
 la solidarité née de la concordance.
 tu es bien agité, moucheron, moucheron!
 et tes forces déclinent
 quitte ce tourbillon, rejoins la cristalline
 de toutes les façons que tu puisses t'y prendre
 il faudra te poser un moment et entendre
 où choisir de tomber, épuisé, sans comprendre.
  
  III
  
 - et s'il me prenait à moi une soudaine envie de désert ?
   ça vous ferait un choc, oh là!
 - oh non, dis, bonne mère, tu n'y penses pas ?! 
  IV
  
 - qu'une m'aille à l'endroit et l'autre à l'envers...
   oh, pauvre, si tu savais!
   je m'en badigeonne le coquillart
   avec le pinceau de la plus grande indéférence
 - tu veux dire quoi au juste :
   ...indifférence ? ...irrévérence ?
 - mais les deux, mon couillon!
   qu'importe, mon couillon!
   pourvu que l'on y danse
   les pieds nus sur le pont
   ou bardé d'élégance
   crasse dans ses haillons
   qu'importe, allons
   qu'importe le jupon.
  comme un filet d'eau
 s'écoule
 ta langue ficelle
 déroule
 longs et volubiles
 du verbe les fils
 et ce long filin
 s'arrime
 à mon oeil marin
 lui prend une larme
 et reporte au loin
 sa trame
  VI
  
 t'eussé-je alors moins aimée
 si tu ne m'avais pas dit
 qu'un jour tu disparaîtrais
 que t'emporterait la vie ?
 ne t'aimerai-je pas mieux
 dorénavant loin des yeux
 mais fort de ce lien au coeur ?
 lui jamais, jamais ne meurt !
  
  
 VII
 quand je te lis ça
 je te lie là :
 sur moi,
 quand t'auras lu ça
 jette un lilas
  
 VIII
 plus aucun oubli de l'aube
 des liens! des liens! des liens!
 et de huit le neuvième
 porte, j'y viens
 et m'y tiens à l'extrême
 du bruissement de l'air
 un reste de soupir
 suffit et veut tout dire
 à nouveau tout de toi
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 tiniak ©2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
 à MissTiss
 La Tisseuse Impromptue