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polétique - Page 9

  • balcons fleuris

    BALCON.JPG

    Aux balcons, le fumeur est Auguste
    aussi le petit, pierres, à son flanc
    cependant que, lingère, une femme rajuste
    au dos du tablier de toile bayadère
    habilement le nœud de ses fines lanières
    et se demande juste, à présent, ce qui l'est
    dans ce tableau brossé - disons, pour l'œil artiste
    moins pour la parité... des sexes ;
    il en est que je vexe ou que je tarabuste
    allez, je le sais bien

    Ah, peste ! Peste ! Peste, que cet écrit !
    Mais ne vais pour autant pas retourner ma veste, dis !

    Lors donc, le buste leste et le verbe studieux
    j'affirme, sans conteste craindre - quoi, si peu !
    Oui, le tableau est juste, est, résonne, harmonieux
    écho de ce qui est comme on le voit d'ici
    la grisaille du monde à nos balcons fleuris

    tiniak
    © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    29/6/2010

  • Poche trône

    livre-ouvert.jpg

    Le livre dans ma poche est plus lourd que moi-même
    Je le lis pour moi-même, il est plus lourd encore
    Je le lis pour le dire et il prend un essor
    que j'ai bien peine à suivre
    Parole ! c'est un jet, ce bonhomme de livre...

    Toi, tu as embarqué à son bord
    mais moi, je suis resté là, dehors
    accrochant mon entier à chaque phrase dite
    le souffle ravagé par la moindre virgule
    au rythme soutenu d'un point par crépuscule
    - ça fera bientôt plus d'un mois, dites !
    que cette occupation m'habite
    et de page tournée en page résonnante
    je ne sens pas le livre amorcer sa descente;
    pendant qu'à ton hublot tu comptes les paliers du ciel
    savourant tous les mots qui disent "tu es belle"
    "ah, tu le savais bien" et "cela va sans dire"
    Mais si ! mais justement ! et mon état empire :
    le temps, je ne sais plus ce que c'était avant
    le geste, un paragraphe, une ellipse... la peste !
    la mer, un drap qui vole aux bras des lavandières
    le vent de sa forêt égaille la volière
    et ça piaille !
    (les oiseaux ne savent pas le braille)
    nous avons pris tant de hauteur
    que je ne connais plus ni le nom de l'auteur
    ni le titre du livre en édition de poche
    - je pourrais regretter la boue sous mes galoches
    mais dans ce tourbillon littéraire
    je ne suis pas d'humeur à regagner la terre

    ...alors, je lis
    pour la joie de te boire ivre d'écrits

    Quoi, déjà la dernière page ?
    mais tu sors de ta poche un autre bel ouvrage
    et le tends
    pour que nous repartions d'un tout nouvel élan

     

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • logorrhée

    (Délit de verbiage)

    Pec30marasme.JPG

    Des logorrhées libératoires
    j'en ai des baquets plein la cour
    où trempent des bris de miroirs
    surnagent de vaines amours

    Ça fume un peu au crépuscule

    - vous choisirez : matin ou soir,
    tout :  le délit des tubercules
    le jus des yeux usés d'y voir

    le ciment boueux des paroles
    dont l'effritement s'agglomère
    avec les serments à la colle
    et les pitoyables prières

    J'en ai aussi pour mes humeurs
    et mes envies de gris sourire
    aux appétits enjoliveurs
    dispendieux et pince-sans-rire

    Ça ploppe, ça nauséabonde
    ça flatule des afflictions
    peinées que la Terre soit ronde
    et l'univers en expansion

    De regrets point, mais que de rages
    au goût de revanche avortée
    litanie des faibles courages
    l'enthousiasme procrastiné

    Dramaturgiques abreuvoirs
    sièges d'auréoles aveugles
    bouches bées crânes, cernes noirs
    qui ne pleurent plus ni ne beuglent

    Votre silence abasourdi
    soit le Cri de Munsch en suspens
    affligeant de catatonie
    l'aliénation du sentiment

    À vos stupeurs de gélatine
    viennent s'empêtrer les marasmes
    de vos capitales lettrines
    aux totalitaires fantasmes

    Ce trop plein d'aigreurs qui m'encombre
    la vue, la poitrine et le sang
    j'en régurgite la part d'ombre
    au comble de l'écœurement

    D’un baquet l’autre, mes crachats
    curent mon esprit saturé
    de gras et pompeux postulats
    m’exonèrent d’une saignée

    À mon tour de verser des fleuves
    jusqu'aux chimers océantiques
    pour faire à l'Aujourd'hui peau neuve
    et manifeste poLétique

    Je sais comme la Terre est plate
    - sinon, quels sauts dans l'inconnu ?
    Adieu, Corbeau ! Siffle, mainate
    le ciel à la jupe fendue

    J’écoute le chant du vivant
    bruire son ample symphonie
    de la fourmi à l’ouragan
    sur le bourdon des tectonies

    Je bois des pluies de météores
    les brandons perdus pour l’enfer
    leur cuivre est plus propre que l'or
    à nous apporter la lumière.

     

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#76.

    Illustration : Jacques PECLERS, dit Pec (1930-2000)
    Toile "avortée", initialement intitulée Marasme.

  • L'Oublieux

    porte-cles.JPGL'Oublieux
    sa porte,
    lui devant qui s'éloigne
    autant
    que son pas l'accompagne
    et l'hier, à demeure
    sur sa porte palière, pleure
    - et ça pleure misère
    tout le vain dénuement
    de son petit quart d'heure en fer blanc

    Postulat admettant
    par défaut le mouvement :

    « lumière vent debout
    lumière vent arrière
    villes... paysages...
    sans garde-barrière sage
    flopée, le tout-venant
    aux visages béants
    qu'autant d'ombres partagent
    sans aucun arrimage au temps
    dont je ne sais plus l'âge et moins le dénouement »

    Nulle trace après l'huis

    Rien à tirer au puits de l'histoire
    ni palette du blanc au noir
    ni l'odeur véhicule
    ni pleurs qui coagulent
    et pas le moindre nom où placer la virgule ;
    exempte de ciment sa forme adjectivale
    ne l'oblige à compter ni en bien ni en mal
    les jalons de sa trajectoire tendue
    hélicoïdale absolue
    dans un bel aujourd'hui fantasque et contigu

    Vient la tentation (salutaire ?)
    des contemplations stationnaires :

    vent debout les microbes, les astres
    et la poussière des cadastres !
    escadrons-les, nos complots lumineux
    pour fondre sans attendre et puis fendre ces yeux
    aux appétits amphigouriques
    d'aspiration cosmogonique
    où pourraient disparaître
    nos précieux alambics
    n'était le bon goût d'hydromel
    de nos crémeux et vastes ciels

    « Hélice, hélas

    comme tout se fracasse
    contre cette invisible passe
    qui me tient droit et dos au mur
    indéfectible devanture
    que seul un charriot
    mû par quatre chevaux
    parvient à franchir chaque soir
    tirant dans son sillage un sombre promenoir »

    Où la contrainte exponentielle
    absorbe le référentiel :

    « Bon vent à vous, les arriérés
    héritages sans intérêts
    si mon sang ne vous albumine
    c'est de craindre que vos rapines
    l'assèchent
    et que s'engouffrent dans la brèche
    les voleurs dans leurs jarres d'huile
    les mousses rongeant la tuile
    et de Poucet les pauvres quignons inutiles »

    La tête faite comme un saule

    épanche sur son épaule
    une frange mouvante aux bras tentaculaires
    s'y attardent - poissons aux destins éphémères,
    des matières vivantes
    des embryons de signes
    qui tiennent compagnie à ses humeurs malignes
    et des vers
    résolvant les énigmes qui dansent dans l'air

    l'Oublieux, bouche ouverte
    et sa plume diserte
    effaçant trait pour trait le monde qu'elle nomme
    tel un maître forain démonte son barnum
    vide son encrier sur une page planche
    - crisse, grincheux archet tes baroques dimanches !
    que noircisse la vierge trame
    et les bris de l'ennui s'écoulant du calame
    recouvrent un semblant d'âme
    sous le saule
    à la tignasse moite
    par-dessus l'épaule, droite

    tiniak ©2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • Les pieds sûrs

    (conjonction de subordinations)

    mandala.jpg

    Que je m'arrête, elle s'en va
    recule à chacun de mes pas
    fait mine d'avaler le ciel
    où elle tient dans la kyrielle
    sa place bleue

    mais

    Que je l'écoute, elle me chante
    un rêve de rives atlantes
    une homélie d'amples murmures
    que répercutent les ramures
    aussi les fleuves

    ou

    Qu'importe qu'ait passé la faux
    quand plongent mes doigts sous sa peau
    le poignet dans son fin duvet
    je la sens frémir et vibrer
    toute sa chair

    et

    Que m'est douce la tessiture
    qui lui traverse la cambrure
    quand son chant crache des geysers
    ou fertilise l'atmosphère
    de cendres chaudes

    donc

    Que je sois œil, oreille, bouche
    main fouillant ses âges farouches
    mon désir où mon songe naît
    lui voue le fantasque souhait
    d'être son ombre

    or

    Que l'heure soit tendre ou brutale
    ses humeurs vives ou létales
    elle est toute à son avantage
    à n'être qu'à son propre ouvrage
    sans inquiétude

    ni

    - quelles que soient les destinées
    des richesses, des pauvretés
    attachées aux prémonitions
    qu'inspire sa révolution,
    aucun espoir

    car

    pied.jpgQu'elle poursuive où je m'arrête
    sa course de ronde charrette
    emporte gloire et incurie
    aux apatrides écuries
    de l'univers

    contre mon besoin de rêver
    que je vole à son alentour
    je sais devoir marcher toujours
    les pieds sur terre

    tiniak ©2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK