A quoi ça tient, la beauté du monde...
Tout peut changer dans la seconde
il y suffira d'un regard
d'une voix qui vient tôt ou tard
de l'attention d'une caresse
d'une vertigineuse ivresse
et c'est l'univers qui bascule
de lumière à ombre et retour
et tout le chemin à rebours
jusqu'au prochain arrêt
interdit devant la Beauté
Beauté
de toutes la plus diligente
à force d'harmonies profondes
où se disent les cris du monde
et ceux de l'intérieur s'entendent
fouler des rêves la face tendre
Beauté, de ta beauté
apprendre
la partition des genres
et se donner la main
avant de traverser
Les couleurs de l'étrange
et reprendre des murs
le crépi fatigué
Le goût de la lumière
et comment on s'abreuve
à ses virginités
Beauté, j'ai su ton nom certain matin de fièvre
j'y ai su et connu comme du bout des lèvres
s'impose à nous ton ouvrage latent
Beauté, bottée par tous les temps
Moi qui pensais aimer au soir
la fin de tous les vains espoirs
je t'appelle, Beauté, qu'au fond du corridor
ta parenté m'inspire encore
armé léger devant le pire
la grimace d'un gris sourire
et ce Cri !
j'en ai l'oreille abasourdie
et ce Sang !
j'en ai le poumon vide et blanc
et ce Jour !
j'en ai brûlé tous les contours
mais je n'ai jamais pu solder
ma redevance à tes clartés
Beauté, oh Beauté des beautés
Beauté qui vois où court le monde
à l'escalier de ta rotonde
un nouveau tableau chaque fois
cadre de fer, cadre de bois
vient compléter ta galerie
sans en altérer l'harmonie
J'ai su
des champs et des forêts sauvages
crachant de fureur et de rage ;
il y pousse des pieds sans jambe
et des bordées de fleuves flambe
l'autodafé des parricides
au long de leurs berges putrides
où chanteront le crapaud-buffle
avec tous les corbeaux - ces mufles !
tandis que la terre ravale
des corps mutilés tous les râles
Je vois
au matin, des chemins d'école
où des cartables les lucioles
sous une lune bienveillante
à demi rongée, indolente
adressent quelques pieds de nez
au soleil à peine levé
J'ai vu
s'effacer le visage aimé
au dernier mouchoir dénoué
puis dans le bougeoir s'affadir
la pâle flamme du désir
l'ombre ramassée sur son ventre
se donner des allures d'antre
où ne dort pas le Minotaure
ni ne passe aucun météore
Je sais
à l'humeur changeante du jour
comme le temps suspend son cours
pour écouter sur l'océan
poussé par les vagues le chant
étrange et mage cantilène
disant de lointaine sirène
le puissant et vif appétit
où s'écrit le bel aujourd'hui
Beauté, Beauté !
t'ai-je tout dit ?
je dois partir avant la nuit
gagner mon rêve
à marcher pieds nus sur ta grève
tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK