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paVupApRi - Page 128

  • Le bal est sur le pont

    A. Renoir

    J'étais encore à frissonner au mieux ma nuit canine
    quelque part entre chien et loup
    le rideau s'est levé d'un coup
    et la pénombre de profonde eut soudain grise mine

    L'aube opéra dans les aigus son timbre d'ouverture
    ça pépiait dur dans les sous-bois
    la terre avait le ventre froid
    le cours du fleuve en mollirait peu à peu les gerçures

    Un théâtre de figurants investit le spectacle
    (on n'en était qu'à l'Acte I
     au début de la scène 1)
    des têtes nues s'acheminaient négocier leur miracle

    Des bras, des roues, d'un vieux la toux, du vent crispant les formes
    vinrent orchestrer sur le pont
    l'ordre d'un bal de promotion
    où se lisaient désabusés les canons de la norme

    À peine, je faisais de l'ombre à cette mise en scène
    droit comme l'est à l'encrier
    le porte-plume en peuplier
    toisant quelques brouillons noircis de rages incertaines

    J'en étais à renoncer à toute action mécanique
    l'argumentaire dévolu
    au détachement résolu
    quand une voix d'enfant précipita ma rhétorique

    " Il a quoi, le monsieur, papa ? Il connaît plus sa route ?
      Il ne peut pas rentrer chez lui ?
      Il s'est perdu pendant la nuit ?
      Tu crois qu'il a besoin que je lui donne mon cass'-croûte ?"

    Je me suis fendu d'un clin d'œil et d'un simple sourire
    adressai un air entendu
    à ce dévouement ingénu
    que deux jambes frêles portaient ailleurs apprendre à lire

     

    Su'l' pont du nord un bal y est donné

    tiniak - Ruades © 2011 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

    illustration d'en-tête : dessin d'Auguste Renoir.

     

    Lien permanent Catégories : °ruades° 1 commentaire
  • muletier

    Jonq-Muletier.jpgDepuis que me traîne mes mules
    par les chambres, les antichambres
    et tous les théâtres guerriers
    pas moyen de trouver la paix
    l'horreur fait toujours des émules

    La paix ? c'est une usine à gaz
    aux suavités lacrymogènes
    où l'éternité crie aux gènes
    de lui garder des métastases

    Il en sort des suées nocturnes
    (la stupéfaction des dortoirs
     quand ça hurle au bout du couloir
     chez le surveillant Casse-Burnes !)

    Ça laisse des paquets de linge
    érigés comme des montagnes
    sur le noir brûlis des campagnes
    payées chair et monnaie de singe

    Puis, ça fait des bulles de rien
    qui ruinent les derniers avoirs
    et jettent les humbles espoirs
    sur le fumier des Gens Tant Biens

    La paix ? mais vous voulez ma mort !
    Que croyez-vous que je charrie
    avec, pour seule compagnie
    ces deux mules qui sentent fort...

    Allez clamer vos joies de vivre
    à vos amours neuves ou vaines
    moi, je vais, ma charrette pleine
    (sans pouvoir achever mon livre)

    Pleurez, chantez, la belle affaire
    - tant ! que ça me fait du travail,
    j'irai par les champs de bataille
    domestique ou à ciel ouvert

    Où j'ai vu - pas plus tard qu'hier,
    où j'ai vu les crocs de la terre se fermer
    sur le plus cher trésor et le vilain charnier

    Jeanne_sur_le_muletier.jpg

    Illustration ci-dessus : Adrien de Witte, Jeanne sur le muletier, 1882.

    tiniak - carnÂges © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour une 100ème contribution aux Impromptus Littéraires
    pour lesquels je lève ces vers :
    "Je me réjouis d'avoir atteint cette altitude
     preuve que je vous tiens pour plaisante habitude"

  • cloué

    Van_Gogh.jpgCette nuit, c'est fait, tout me quitte
     un autre monde est apparu
     où tu ne me reconnais plus
     où désormais rien ne m'invite

    La lune ovale est vert olive
     quelque brosse a figé le vent
     sur une toile de Vincent
     que d'un œil troublé je salive

    Orage, apporte-moi le rire
     indompté de chevaux mongols
     il se pourrait que je sois fol
     au point d'y fonder mon empire

    Une éternité de supplices
     au vrai, ne me tourmente pas
     l'enfer est aujourd'hui et là
     où je ne goûte aucun délice

    Et cette aube qui m'assassine
     impeccablement met à jour
     le solde des vaines amours
     teintant l'ombre d'orgues sanguines

     

    tiniak - carnÂges © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    la nuit du 30 décembre 2010

  • mécanique ? huis l'est !

    rouages.jpgEn mode automatique
    le Roi de la Bernique
    rentre les pieds au chaud
    sac à vin sur le dos
    à la main une canne
    affectant un air crâne
    le front ceint d'un chapeau
    vogue sur un vers d'O.
    dans la gorge, ce cri sauvage :
    « À cul, l'hypocrisie ! J'en rage »
    mais il chante :
    « À moi ! À moi, orgues atlantes !
      Je signe sur le fleuve
      les alarmes pour preuve
      que le monde réel
      se saoule de sempiternel
      quand la vérité sourd
      de bien improbables amours »
      se faisant, jette à l'eau
      une poignée de sable
      s'assied, puis s'interroge
      en termes plus aimables...

    Où est le temps de rire ?
    Quel est le sang des pleurs ?
    Et comment se le dire
    sans heurts ?
    L'océan vient buter sur les rochers hors d'âge
    (et personne jamais pour en faire un fromage)
    Les mouettes s'en amusent
    Les moules s'y agrègent
    et de sirènes muses les arpèges
    y ricochent
    mais des majorités d'arguer de l'Allons Donc
    de juger « c'est abscons,
    imbécile, fantoche, obscur à la raison »
    préférant leurs tiroirs
    où ranger, séparés, le paraître et l'avoir
    le duvet marital
    et certaine idée préconçue
    du bon, du vrai, du mal
    et du Bien Entendu

    « En matière de ritournelle,
      c'est la paille et la poutre !
    s'échauffe le J'en Foutre,
      à vous statufier des Cybèle
      pour leur coller des queues de loutre !
      Allez y démêler l'outrage...
      J'ai mieux à faire ; en outre,
      m'attend au coin quelque carnage
    - des plus précieux, et d'importance !
      de ceux que nous offrent la danse
      à sa façon, millimétrée,
      d'être à l'art de tout dépenser »

    Mais la plus sotte mécanique
    observant sa propre métrique
    parvient toujours à ce palier
    quand le verbe et le pas s'arrêtent
    sur le seuil où, finie la fête
    la tête lourde dodeline
    la gouaille range sa cuisine
    et la main va tourner la clé
    des habitudes retrouvées.

    tiniak - Ruades © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour un Impromptu Littéraire - tiki#99
     

  • saloir

     

    SALOIR

    Un œil à la cave
    où la viande fume
    quand l'autre suave
    au coin de l'enclume
    (pas de troisième à défaut ?)
    j'attends la leçon
    les mains dans le dos

    À regard chiffon
    vaporeux miroir
    Force à la raison
    l'essuyer, c'est voir
    au tréfonds d'un noir oubli
    les fragments de runes
    logés dans ses plis

    Ronge à la maison
    ton petit tamis

    La poussière vient
    gratter à la porte
    (promener le chien
     pressé qu'on le sorte ?)
    Je dénonce un pieux serment
    et, pour son tanin
    sucre du vin blanc

    Une goutte d'or
    a séché sans bruire
    la peau du décor
    à n'en plus finir
    écharpe le cuir du jour
    où viennent pourrir
    les vaines amours

    Range à la maison
    ton petit ami

    Fermé le placard
    sur les draps de l'Un
    de l'Une les fards
    et leur lot commun
    le regard se porte ailleurs
    et darde à l'aveugle
    un autre vecteur

    Courbe et asymptote
    - l'ai-je déjà dit ?
    n’offrent pas la botte
    à l’œil inverti
    La cave où mijote un songe
    n'attend que la joie
    pour jeter l'éponge

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK