Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

hypocrisies - Page 2

  • Révolution des résolutions

    « Tu voudras bien d'un gâteau, maintenant »
    dit la bouche fine, parlant
    sous le regard à l'ombre
    avec, sur le gâteau
    une manière de prière
    et dans le dernier mot
    à deux doigts de l'espièglerie
    une certitude alanguie
    déposée devant les mains jointes
    l'une par-dessus l'autre, éteintes
    ou peut-être engourdies
    ou feignant de s'être assoupies

    ...Et quoi ! d'autres font la sieste à cette heure
    au prétexte que la chaleur l'exige
    Ça, et puis le nombre de piges...

    Sur la nappe en toile cirée moutarde
    une couteau patiente sur sa garde
    il ne veut plus jouer à l'horloge
    espérant là qu'on l'en déloge
    et bientôt tinter dans l'assiette
    et trancher et faire des miettes
    mais l'assiette aussi, vide et pâle
    attend au pied du verre, sale
    où de vestiges en fragments
    subsiste une gloire d'enfant

    L'assiette à un bout, la voix de l'autre
    et au milieu boude une poire

    Une poire en est pour ses frais !
    Elle qui s'est coupée en quatre
    en quatre encore et puis en quatre
    Elle a sucré, de ci de là
    de quelque bras long quelques doigts
    Elle en garde le dos pelé
    et personne pour y goûter ?
    C'est gâcher ! C'est misère !
    et qu'en dire à la Terre Mère !

    Dans le rai de lumière
    que laisse un volet entr'ouvert
    partager l'intérieur
    arrimé ferme à son balcon
    l'oiseau de la tête, non-non,
    décline cette invitation

    C'est qu'il a résolu hier
    de faire maigre tout l'hiver
    ayant cet été pour dessein
    de voyager léger (enfin!)

    C'est ainsi ...allez !
    C'est tant pis, pour les
    bonne poire,
    pov'pommefête des miettes,
    voix dans le noir...
    l'oiseau a quitté son perchoir;
    il ne reviendra de sitôt
    que l'on célèbre l'an nouveau

    Voici comme en révolution
    s'ensuivent les résolutions


     

    tiniak © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    impromptu littéraire - tiki#64

  • ça crame en ciel

    Oh, comme je vous aime ! oui vous, les Tous En Choeur
    (c'est que j'en ai l'humeur, aussi profitez-en...)
    Je prends tout : rires, pleurs et puis tous les enfants
    vilains qui vous encombrent;
    vous qui êtes du nombre
    - et dans l'ombre affairés,
    de l'Efficace Ardeur à Peiner au Labeur

    Que j'en saigne pour vous
    ...Tout mon sang doux
    et fondant comme beurre

    Laissez venir à moi tous les gentils esclaves
    que j'en essuie la bave au pli de leur menton
    Que des gentils esclaves la sueur au front
    et tous leurs longs chants slaves
    devant les choses graves
    sachent baisser d'un ton
    leurs sanglots de violon parmi les betteraves

    Oh, ça ! j'en ai des attentions... et pour la gloire
    et toutes les mesures conservatoires...
    J'en ai des rituels, des onguents et des baumes
    j'en couve de la paume
    vos stigmates mortels
    qui noircissent les tomes
    et gonflent le cheptel du Livre des Sempiternels

    Que j'enseigne pour vous
    à d'autres fous
    ralliés à l'ombelle :

    Bienheureux les panais, les sureaux, les cerfeuils
    qui font du bien commun, chacun sa fleur une autre
    Ils seront les premiers, passant devant l'épeautre
    le sorgho, le millet
    qui singent tant le blé
    qu'à la fin ils se vautrent
    dans la Morte Saison où pourrissent leurs feuilles

    Les premiers, je vous dis !
    montés depuis le sol jusque dessous le ciel
    pour en masquer, comme pins parasols
    le désastre sacramentel

    Ombelles ! Ombelles !
    Ombilicales floralies,
    ce sera fête au paradis
    où vous accueillerons
    moi, mes frères et nos chansons

    Nous chanterons des "Je vous aime"
    et puis des "Ave paria"
    célèbrerons des renégats
    le magnifique thème
    des Vains Sacrifices Bohèmes

    Mais, c'est bon ! vous y viendrez aussi
    Vous, les convenus Bons Partis
    mais - une Foi n'est pas coutume,
    vous coucherez nus sur l'enclume
    où maître forgeron achève
    de marteler nos rêves, nos rêves !

    Nos rêves, entendez-vous ?!
    Que j'en saigne tout mon sang doux

     

    Племе_парија_brunoSchulz1920.jpg

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    illustration : Bruno Schultz, vers 1920.

    en hommage à "Племе парија"
    "La Tribu des parias", de B. Schultz.

  • Cassandre à l'antienne

    Quand j'aurai assez bu - mon vers ! de tous vos pleurs
    me servirez vos cœurs et votre âme à l'envers
    et serai toute ardeur à clamer vos mystères
    à votre sourde oreille où je sonnerai l'heure

    Cassandre a l'alarme fatale

    Vous me jugerez sot, inconvenant, sévère
    saligaud bien ingrat, fou peut-être - ça va...
    mais je ne dirai rien que ne sache déjà
    votre bouche embourbée de pelletées de taire

    (Cassandre avait des couilles ?)

    Ne parlons plus de vous ; disons l'Autre (absolu)
    et vous applaudissez à la fin du spectacle
    partageant le regret des antiques oracles
    avec votre voisin qui n'a rien retenu

    que ceci (ce passage un peu cru, j'en conviens
    cavalier pour le moins puisque ça parlait cul
    et disait, ce me semble, à peu près ce qui suit) :

    Cassandre a dit Ceci

    ...Ah bonjour, entrez donc !
    faites, je vous en prie
    ...le ventre sur la table, Ninon
    ...est-ce là que tu trembles ?
    et oh et ah et han !
    et voyons maintenant ce que dit ce cartable
    ...ça fait bien des devoirs
    s'en remettre à deux mains serait pas raisonnable
    ...bonsoir...

    Mais c'est la vie encore et de ce qui vous fâche
    c'est de mâcher la mort dans un brin de genêt
    puis d'en dévorer l'or sans plus le contempler
    que vos cieux dont j'adore agacer les dieux lâches

    (Cassandre est anarchiste ?)

    Aussi quand je m'invite avec mon gris sourire
    à vos farces de fête aux simiesques grimaces
    et décolle des miettes prises dans la glace
    le reflet sirupeux de vos masques empires

    voici que le brouillard ceignant vos majestés
    en déserte le socle et révèle les douves
    et ce qui pourrit là des secrets que l'on couve
    exhale ses humeurs jusque sous votre nez

    Cassandre a du flaire

    Et, oui ! ça sent la merde et la mort des soleils
    tout le triste abandon des appels en souffrances
    toute la contrition d'intimes appétences
    et le saint sacrifice des simples merveilles

    voici que vos créneaux chopent la chair de poule
    et soudain mous du cou les donjons qui s'affaissent
    que la herse édentée ne tient plus ses promesses
    et tous les chevaliers qui rejoignent la foule

    Cassandre a ses humeurs

    tandis qu'au rempart sud montent des oubliettes
    la très insupportable au regard indigence
    et ses multiples voies entrant en résonance
    pour former le fracas du seul Cri qui s'entête

    à battre le rappel de tous les pieux serments
    à couper le sifflet de tous les trains ignobles
    à rendre la douleur des forêts, des vignobles
    au passage enroué de tous les quatre vents

    Cassandre a fini sa colère

    Alors je ne tiens plus debout dans votre grâce
    et l'aura de mon verbe est un casque de feu
    qui vous donne la fièvre et vous ronge les yeux ;
    vous dites : "À genoux ! À la niche ! À ta place !"

    Cassandre a bien du chien

    C'est bon ! C'est bon ! les chiens me sont plus fraternels...
    mais je n'ai pas fini, car vous pleurez encore !
    Pleurez-vous des amis les entrains, les transports ?
    Pleurez-vous de vos nuits les vides essentiels ?

    J'en ai cueilli des pleurs au chevet des regards
    qui vous sortaient de sous l'arche du frontispice
    qui vous faisaient la peau des joues comme un calice
    et mêlaient à leur sel votre unique nectar

    Cassandre a le dégoût simple

    ...Et non, vous ne pleurez que votre solitude
    - on en fait des brassées qui couronnent les tombes,
    mais n'apaisent jamais la gorge des colombes,
    de ces pleurs ignorant toute sollicitude

    Si j'en buvais le quart, en pisserais des fûts !
    Adressez-vous ailleurs (d'ailleurs vous savez où)
    Ce n'est pas mon affaire...
    Oui, j'ai quelque exigence, alors, en la matière

    Cassandre a des exigences en la matière

    Peu m'importent du fond le goût ni la couleur
    l'enveloppe... le rang... Je bois des pleurs limpides
    la goutte qui vous tient en suspens dans le vide
    aussi brutal et nu que l'est votre malheur

    Et c'est quand vous chutez que je tire la langue
    à qui je dois le don de muer votre peine
    en poème, en chanson, en longue cantilène
    et même, à l'occasion, en pamphlets ou harangues

    Cassandre a du savoir-vivre

    car je ferai grand cas - sans draper à outrance
    de votre dénuement l'aube apocalyptique,
    de votre dénuement toute la sémantique
    en repeignant vos ciels d'une neuve espérance

    avec les mots de paix, compassion, connaissance
    qui sont l'oraison pure et vive de mourir
    calice.jpgpour accorder à l'autre le soin de les dire
    et bâtir à nouveau l'amour de l'existence

     

    tiniak © 2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • Élections

    (suffrage par ciel)

    coin2.jpgà Jérôme FANSTEN et Sofia COPPOLA

    Et puis, rentrés chez eux, ils avaient tout béni
    les arbres, le repas, la chambre des petits
    avec dans leurs mains jointes
    une blancheur de plinthe
    qui fait ce beau sourire en coin au bas du mur

    On était vendredi, samedi ou dimanche
    enfin, un de ces jours qui comptent sous le ciel
    un jour en robe blanche
    - ou pivoine... ou pervenche,
    brillant comme du miel jusqu'au bout des chaussures

    Et comme il faisait bon, ils sont restés un peu
    à parler des voisins, à rallumer le feu
    avec le menton lourd
    des largesses du jour
    qu'ils savaient méritées après force rigueurs

    Le grand Lui, le grand On et tout son tralala
    emplissait la raison d'être de ce goût-là
    qui vous rend bien meilleur
    que les autres ailleurs
    puisqu'Il les assurait de son divin Amour

    Et rien ne sera dit d'autre que Sa Parole
    et les enfants iront dès demain à l'école
    avec tous leurs semblables
    et pénibles cartables
    emplis jusqu'à ras bord du Devoir Accompli

    C'était le moins, le mieux et le bien entendu
    que de baisser les yeux et de n'en parler plus
    il n'était que de vivre
    le Jugement du Livre
    aurait le Dernier Mot et tout serait guéri

    Oh, la Miséricorde ! Oh, Vierges par milliers !
    Oh, Tout ! le Sacrifice et le sang du Bélier
    pour le service d'ordre
    pour les pommes à mordre
    pour le juste retour des Justes d'Entre Nous

    Ah, ça valait peine
    de garder le secret de toute la semaine
    et d'aller dans la Paix de sa nature humaine
    participer de l'Œuvre
    Totale... Finale... et si impénétrable
    que c'en est confortable pour l'humilité

    Ah, plaisir d'élection que toute Sa Beauté !
    Demain dans le journal tout sera bel et bon
    fatal et pardonné
    la page tournée

    vu à Belgrade

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

  • hypocrisies ? des chapelures...

    guillotine.gifHypocrisies ? des chapelures !
    répandues sur les chairs
    molles comme mohair

    et dessous l'âme
    qui crame, crame, crame

    Pardon, madame
    où est votre âme ?
    je crains incidemment
    d'avoir marché dedans

    hypocrisie des politesses
    servies aux courtisées
    pour mieux s'en défausser

    Pardon, cornard
    range ton dard !
    ou, veux-tu te moucher ?
    tu as la goutte au nez

    hypocrisie des mœurs viriles
    dressées sur des ergots
    inutiles dans l'eau

    Pardon, monsieur
    voici vos yeux
    ils traînaient sous les jupes
    de votre jeu de dupes

    hypocrisie des solitudes
    abreuvées au puisard
    des plus torves regards

    Pardon, petite
    lâche ma bite
    tu n'en as l'apanage
    - il est plat ton corsage !

    hypocrisie des régalades
    promulguées vers la Chaire
    depuis les bancs déserts

    Pardon, vieux con
    - c'est quoi ton nom ?
    dis, pourquoi tu m'agresses ?
    par déni de jeunesse ?

    hypocrisie des préséances
    dues aux sommets de l'âge
    et tous ses commérages

    Pardon, la poule
    parmi la foule
    mais, vois-tu, mes deux mains
    en ont après tes seins

    hypocrisie des impudences
    promues au rang d'esprit
    - qui manque aux malappris

    Hypocrisies ? des chapelures !
    répandues sur les chairs
    molles comme mohair

    et dessous l'âme
    qui crame, crame, crame

    tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK