doux* :
Les jambes les plus belles
ne me sont rien
sans qu'un pied, joliet
finisse bien
qui de l'arrondi, qui du galbe
c'est le pied qui fait tout aimable :
s'il est vivant, presque enfantin
que la chair l'enveloppe bien
c'est un délice
un doux supplice
que de remonter vers la cuisse
ou de la garder bien en main
osseux, il est par trop amer
et me fait craindre un caractère
bien trop précieux pour tolérer
qu'on se pique d'en chatouiller
la plante cambrée
veineux, il me saisit d'effroi
surtout fini par de longs doigts
j'y vois les serres de la mort
même à l'extrémité d'un corps
propice à de puissants émois
je n'en veux pas
je l'aime
musclé sans être bombé
replet sans être joufflu
cambré sans être creux
duveteux mais pas poilu
que m'importe l'alignement
des doigts de pied si, cependant
ils parachèvent l'harmonie
du pied qui me ravit
quel plaisir de l'imaginer
quand au dérobé, la cheville
se révèle douce et gentille
quelle horreur de le découvrir
aussi négligé qu'un fakir
alors qu'on a bien entamé
la consommation du désir
suis-je fat, espiègle ou mesquin ?
(et pourquoi pas tout à la fois)
il est vrai qu'au petit matin
ce pied détermine mon choix
d'aller à la boulangerie
ou bien de déserter ce lit
; qui prodigue en tout sens un sentiment d’agréabilité limite puérile.
- Sur ta laine annelée et fine / Que l'art toujours voulut raser / Ô douce barbe féminine / reçois mon vers comme un baiser [Théophile Gautier].
énergique :
l'heure avait le front noir et or
à en courber l'échine
l'automne et ses rapines
dépouillaient nos grands frères
les nuées se livraient encore
à quelque horrible fête
on y tranchait les têtes
dans des éclats de rire
et moi de contempler le spectacle sauvage
comme un autre à la plage regarde ses pieds
un capiteux parfum d'été
engluait l'atmosphère
il vous coulait de l'air
jusque sous la pelure
des incantations débridées
mugissaient à folir
ou priaient d'un soupir
que l'eau mouche la terre
et moi j'applaudissais la venue sur les Maures
de madame La Mort et tous ses nains mauvais
la ruée s'abattit brutale
tapotant sur les tuiles
changeant le sol en huile
ruinant les capillaires
cette chevauchée magistrale
s'écriait : ville prise !
arrachant aux chemises
l'opacité mature
et moi de savourer toujours
de l'orgie cathartique
les foudres énergiques
m'inspirait de l'amour.
; peu regardant à la dépense pour produire du travail, s’offrir une suée ou mobiliser l’essence.
- Sartre avait adopté un énergique slogan : science, c’est peau de balle. Morale, c’est trou de balle [Simone de Beauvoir].
flatteur :
C’est l’heure plate du flatteur fat
dans son assiette comme il se doit
en présence du joli monde
du joli monde et sa faconde
Il distribue les billets mous
posant sa main sur les genoux
Il a pris ses grands airs de faune
pour transférer sur son i-phone
des mots de célèbres auteurs
à l’appui de son trait flatteur
Il est content de lui, c’est là
toute l’âme du flatteur fat.
; d’un mot qui se veut plus haut que l’autre le moindre.
- … Soupirs, sourires flatteurs, tout est mis en usage / Quand il s’agit d’attraper un amant. / Je n’en dirai pas davantage [La Fontaine].
* poLèmes précédemment parus sur pavupapri
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tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK