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Mai disant
Tout a pris faim il y a dix ans et quelques joursDonc, j'ai dix ansdès à présentet je viens de vivre une sacrée journée-four !J'ai découvert à l'aurore un soleil violépar l'haleine d'un vieux marin chargée de moussedéjà la journée courait, la mort à ses troussesson élan pris depuis mon petit-déjeunerLes huis libéraient leurs effluves quotidienscharriant les bruits de la comédie laborieusele sang perdu coulant de ses mains oublieusesquand, sur son paillasson, j'enjambais mon vieux chienJ'ai recueilli un vol de mouettes, quai Vendeuvrepassé la main au ventre gris de son Vieux Portpayé d'une plume nouvelle pour mon sortun franc sourire au long empire à la manœuvreL'heure avait les cheveux plus courtsJe t'ai reconnue sans maudireQuel heur célébrait l'alentour ?Un mystère de mai n'y voulait pas suffire !J'ai parcouru la ville à genoux, haut le frontdans la poche une main prête à sortir mon soûldans l'autre ce mouchoir qui ne me dit pas oùet la semelle offerte à de soyeux marronsLe vent marin jouait des gammes peu bourgeoisessur d'antiques matins perclus de véritéL'après-midi faisait des bonds désordonnéscraignant l'inimitié verte que l'On dégoiseJ'ai abouché le flanc d'une triste panthèreavec le sentiment de lui mordre bien plusComment s'en consoler puisqu'elle m'a dit "Tu.." ?Moi, triste Gagne-Pain de ses maigres affaires !L'heure avait les cheveux plus longsJ'y mêlais mes doigts fatiguésJ'avais du mal à respirerDans le mai blet, me faisais l'effet d'un goujon !J'ai embrassé le pli de la nuit approchantsa robe sur les toits du monde grabatairecriant les noms perdus de mes Trop Être cherset ne pouvant rien faire autre que les aimantLe tableau s'est conclu sur un carnage veuleavec les mains fouillant cette peau infertileoù je peine à trouver la ferveur érectiled'une journée passée sans que mon âme feuletiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesKpour un Impromptu Littéraire - tiki# 231 -
nuit, t'ai (veste et pull)
Où t’es-tu cachée, disPépite feue Jaune-Or ?As-tu grimpé la rueson dos cambré à l’ouest ?Je t’ai perdue de vuemais j’ai gardé ta vesteà mon coude, sans plielle respire encoreLe Soir qui m’accompagnea le vent douceureuxIl n’entend rien aux chantsdes pavements frivolesoù je vais – garnementloin de sa vieille écolemener fière campagnechez les noctambuleuxJ’emploie les intervallesà te chercher, Pépiteà la carre du jourgisant au pied du murdans le moindre alentourdes porches, des toitureset tout l’Ornementaldes balcons éméritesMais le Soir – ce fêtard !m’est plus accaparantIl me saisit l’oreilleou par le bout du nezm’entraîne dans sa veilled’échos en ricochetsà crisser du regardsur la craie mollissantÇa s’ouvre – sans magietant de lieux sont faits pour !’faut glisser l’étincelleen gage à leur entréepour de vertes chandellesje t’ai donc oubliéel’épaule travestiede futiles atoursJe songe avec le Soirà de nocturnes chairesdans cette orangeraieaux juteux abattisnous caressons la craiedéjà bien assouplieaux flancs de ses couloirsles soupirs éphémèresCar la nuit a surgien son grand apparatpour sceller notre sortjusque à notre heure diteIl n’est plus, là, dehorsnul port où ne s’invitele souffle court, le crid’anonymes combatsPépite que j’honoretaisant combien je t’aimeau plus fort du carnageet sans urbanitéje ne sais plus ton âge- ma nuit l’aura figécomme le nom des mortshabite les poèmesQuelle veste, dis-tu ?tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesKpour un Impromptu Littéraire - tiki#230 -
ladite
L'Or ! Elle prenait comme moi,le 18h45Si elle n'y paraissait pas,je m'en consolais sur le zincA son passage près de moipour prendre sa place habituelleje m'enivrais du gardéniapris dans ses tissus coccinelleDu regard, je comptais les poisde sa poitrine à son bas-ventrealors, j'inventais quelque loidont nous étions toujours le centreIci les champs, là-bas les boisqui m'évoquaient des océanspriant que le charme opérâtau-delà, je figeais le tempsTaire le sens de mon émoim'inffligeait une sourde peineet me rongeait d'anonymatdepuis le cœur jusqu'à la couenneEt le voyage finiraune heure après quelques poussièresL'Au-Quotidien l'emporteraquoi que m'en songe, Passagère !tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesKpour un Impromptu Littéraire - tiki# 229 -
pausa ante CCXXX
Pause(s), malgré tout
(tiki#228)
(tiki#229)
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bleu pâle
La chaleur mollissait. Quant à moi – pour l’avoir bien battue ! je finissais de polir cette peau chagrinée que m’avait revendue un vieil amour de foire. Tu connais cette histoire, elle ne t’a jamais plu.
Mordent les mots, tanne l’heure…
La fadeur éluda le nombre des Jamais
tant qu’à son front déjà crissent des plis de suaire
où ne craignent le vent ni sables ni poussières
et se lisent, mauvais,
de vilains songes
leurs salves trait pour trait
refusant au tableau d’aller passer l’éponge
« Oh, pardon, j’ai fini, oui. Le temps de remballer mes outils et je te laisse la place… Amuse-toi bien. Il fait moins chaud, déjà. »
Connue, la rue me prenait en patience. Un peu de pain, ici. Là, un air de piano. Un morceau de fromage, quelques pas plus avant. De « coucou ! », de « hello ! », du « comment ça va-t-y ? » Point. Zéro. Je ne suis pas du genre qu’il faut et je m’en accommode assez, depuis que j’ai quitté mon quartier pour m’installer dans les parages. Oui, bien sûr, à mon avantage, après ce qui m’est arrivé. Depuis, je soigne mon incognito, disons… paradoxal, qui appelle ou fait fuir des regards étonnés ou sales.
D’absence de mots naît l’horreur…
Des yeux dans tous les sens ! Des bouches !
Les cinq, envahis par le monde !
J’ai l’impression d’être un cartouche
dans les yeux d’une sotte blonde
Ma joie se perd dans le chien qui fait un écart
Je ne rentrerai pas chez moi, quoiqu’il fût tard
« Non, ça je peux pas te dire. Simplement, au mois de mai, l’an passé, après avoir bu mon café du matin, je vais où tu penses, je me lave les mains, lève le nez et découvre dans le miroir un type étrange qui me regarde avec un air effaré. Blanc comme un linge maladif. Les yeux presque aussi pâles, furtifs. Oui, fuyants, brusquement – comment dire… par saccades, avec une frénésie de mécanique emballée, déréglée ! Bêtement, je me retourne… La douche, comme d’hab… Personne dedans. Je reviens au miroir, et là, je comprends… Le macabre, c’est moi - moi le caribéen d’origine ! affublé de cette peau livide, de cette morbidité sordide, incurable, avec ce regard fou, partant de partout. Stupeur, peur, incrédulité, déni, docteur, d’autres docteurs, leurs examens, cauchemardesques abymes – et au fond ? rien ! Suées, incompréhensions, questions pressantes, quotidiennes, bouche bée sans réponse : déménagement ! Et dans la tête, obstinément, ce lent tourment de Jean Sablon (un vieux, mais alors très vieux truc) : Vous Qui Passez Sans Me Voir… Consternations. Constipation. Relâche ».
Mes outils à la taille, je rentre pour manger mon pain. Ce soir, j’ai Groupe de parole. Et je n’aurais rien à y dire que : Toujours, Le Même, Pavé Dans Le Four ? … Inexplicablement….
Non, pas ce soir ! Ce soir, je sors de ma réserve. Je ne suis plus cet être figé qui s’est réveillé un jour albinos, inexplicablement. Désormais résolu à m’accommoder de ce handicap, je veux m’exprimer devant mes pairs.
Marre de passer pour un bleu !
pour un Impromptu Littéraire - tiki#227Illustration dénichée sur Hibiscus jaune