eau
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solero
Sa lèvre ourlée de mousse attend que je l'embrassed'un lent panoramique amoureusement vertje goûte avec bonheur cette langue de merqui écarte les doigts de notre terre grasseOpérante magie d'échos luminescentsl'orfèvre tragédie du jour contre le soirremue sa féérie d'ordres contradictoiressur la table servie pour leur assemblementLà, je prends la mesure au cordeau de mon êtreavec le poumon plein des chansons du métieravec le poumon plein de l'envie de crieret le cœur au-dessus qui soupire : « peut-être... »En d'autres lieux-sans-doute avec toi contre moi(tellement que tu m'as traversé !)à siéger au chevet de tes obscures loisj'eusse été le jeu de leur toupetRendu à la valeur des souffles généreuxdans la paresse de leurs dentellesfouillant du nez leur sein organique et soyeuxj'enclenche à nouveau la manivelleOù que partent les pluies que fourbit le marinelles n'ont plus le goût de mes pleursl'Aujourd'hui me suffit; que passe leur cheminloin de l'herbeux regain que j'effleure(De feu, point !Et d'entendre son chant délirant encor moins !)tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK -
lapidaire
Il est assis
les pieds saisis par la rivière
dans le souffle doux et discret
du bois qui parle depuis des siècles
avec ce timbre connu des faunes
hérissant des champs le duvet
- l'oreille saura mieux l'entendre
les yeux clos,
ce qui se raconte à la terre...
Il entend, mais il est distrait
dans sa bouche gâche une pierre
avant de l'envoyer dinguer
en ricochets sur l'onde claire
et dépolie
À peine a-t-il fini son geste
il se rassied, les pieds dans l'eau
et met dans sa bouche à nouveau
un caillou dont sa langue teste
le glacis
Il y prend le temps nécessaire
que de rugueuse jusqu'à lisse
la surface nue de la pierre
soit proprement prête à la glisse
et embellie
À l'enfant qui vient sur la rive
il offre un curieux spectacle
réminiscence des oracles
dépourvue d'emphase abusive
- pour la joie ?
Il est debout, les pieds dans l'eau
nimbé de mouvantes brillances
il répète la même danse
avec un arbre pour chapeau
et ce sourire
que lui arrache le prochain bond à venirtiniak ©2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
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Les Grandes Eaux
Les eaux n’avaient de cesse de monter, depuis.
La ville submergée était abandonnée
par la plus grande part des gens catastrophés.
Et la pluie qui semblait ne plus jamais devoir
s’arrêter de pleuvoir
ricochait sur la Chambre Noire.
Tu m’avais recueilli, transi, abasourdi,
sur le canapé-lit de ton premier étage
où je brûlais de fièvre et buvais de tes lèvres
la force qui manquait à mon piètre courage.
Les eaux n’avaient de cesse de monter, depuis.
Plus de rez-de-chaussée, dans la ville noyée
dont les rues n’étaient plus que canaux en lacets.
La pluie ne faisait plus scintiller les trottoirs,
continuait de pleuvoir
et menaçait la Chambre Noire.
Nous n’avions que le temps de voir couler le temps
qu’il nous restait à fondre dans la Chambre Noire.
De l’aube au firmament, prisonniers finissant
d’acquitter notre peine à purger nos espoirs.
Les eaux n’avaient de cesse de monter, depuis.
Les vivres qui manquaient, le froid qui redoublait
dans cette humidité qui s’emparait du monde,
la pluie s’en réjouissait, drue et nauséabonde
martelait son heurtoir
sur le seuil de la Chambre Noire.
Je t’ai lâché la main dans un soupir, serein
juste comme mon cœur achevait de se taire.
A cet instant certain que tu pourrais enfin
quitter ce lieu, survivre à cet enfer.
Les eaux n’auraient de cesse de monter, toujours.
Mais toi, tu seras libre, mon amour.nobertiniak © 2004-2008 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
texte inspiré par
une photographie extraite de La Chambre Noire de Gaëna.