Je te prends par la main, belle nuit sans sommeil
où Nulle Autre Pareille est encore à venir
elle est humide, fraîche et me garde un soupir
pour l'heure avant que l'aube assoiffée n'appareille
Un message est figé dans le suspens des astres
à l'infini cadastre où tracent les pensées
leur proprette Qabale au membre délabré
sans même avoir idée du Songe qui le castre
« Gagne-moi l'âme entière ! Absorbe mon regard !
Il n'est jamais trop tard pour mériter l'Oubli
Nocturne Suffisance, en ton secret abri
je renoue avec l'or de mon premier hasard »
Eh, quoi ? J'entends un pleur, une larme - sans feint !
le terrible festin d'être seul en conscience...
Ah, mais ! tu m'as rejoint, ma chère Obsolescence
et sens battre ton pouls, juste là, sous le sein
Mésange sans souci qui dors sur ta nichée
que n'as-tu rapporté sur tes ailes agiles
un parfum d'outre-cœur à l'ombre malhabile
à lire dans le ciel où ses pas l'ont portée ?
« Érige mes transports où nul n'y peut contraindre
un désir que l'Âme-hors soit la révélation
que la peine s'abreuve où règne l'abandon
mais qu'il n'est de raison aucune de s'en plaindre »
Nous voici sur le seuil de nos grands tralalas
toi, mon Petit Émoi et toi, mon Juste Rire
avec le ciel pour dais, la terre pour mourir
et le temps méconnu pour y livrer combat
Tout finira soudain - comme chaque aventure !
par une autre ouverture au capiteux parfum
qui nous ferait passer la nuit dans l'autre main
alors qu'elle nous tient, jusqu'au bout; ça, c'est sûr !
D'où que vienne leçon, par foi ou d'expérience
une intime évidence accuse la passion
sur le trait vaporeux des lointains horizons
comme au douillet giron des sourdes appétences
« Eh, là-haut, mes transports ! Avez-vous fait le tour ?
Il n'est plus loin le jour et je me refroidis…
Ramenez à bon port quelque nouvel ami
qui sache mieux que moi vanter le frêle amour »
Pourtant que passe l'heure à son rythme intrinsèque
l'instant que je dissèque au gré du sentiment
semble d'éternité prolonger le plain-chant
et sur l'orgue du temps lever toute hypothèque
Âme, corps et sang frais, dans une chorégie
s'accordent à la nuit, à son vaste bourdon
En résultent l'esprit et le lent diapason
de la contemplation dont j'énonce le prix
Lors, c'est déjà Demain qui frappe sa monnaie
sur le dernier pavé dans la mare des rêves
car le Grand Passager n'observe aucune trêve
Un vol d'oiseaux s'élève et va le célébrer
« Encore une minute, allez ! pour le rappel
que me réclame un cent de mes songes en lice
et lever mes filets des nocturnes abysses
où se sont abîmés tant de noms fraternels »
Hospitalière nuit, tu me lâches la main…
Aux signaux quotidiens, perle par tous les pores
une suée de chagrin aux laborieux essors
couvrant de ses débords l'ample épiderme urbain
Et le jour a troussé son jupon sur les cimes
Sa lumière m'intime à nouveau d'avancer
à l'aveugle - tant pis ! mais au coup de sifflet
avec le pas réglé sur son seul paradigme
Un Autre, près de moi, a-t-il cette impression ?
Que peut-il bien jauger de ma propre existence ?
Est-il trop occupé à tenir la cadence ?
…Tant de possibles sens, qu'une destination !
« Rangés tous les transports, allons ! dans le barnum...
Il se pourrait que Pomme (à nulle autre pareille)
après avoir soldé son bon peu de sommeil
soit prête à partager son singulier pensum »
Et quand la nuit viendra, nous lui tendrons l'âme, hein ?
tiniak ©2014 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK