Pauvrette
la chanson que tu as en tête s'articule
sur l'axe fatigué des tes nœuds et rotules
où s'arriment
tes membres décharnés par le manque d'estime
chacun d'eux si inversement proportionné
aux plis sous le manteau de ta chair boudinée
qu'il te pèse
- quand à leur approche des autres les yeux biaisent
ton regard,
de charrier sur le boulevard
Pas à pas, sombre silhouette
la chanson que tu as en tête
défigure
les rideaux d'aciers tirés sur les devantures
les néons morts, les chats trop sales
les taches sur la neige pâle
les guéridons les pieds en l'air
et le chien-chien à sa mémère
qui pisse un coup
pendant que l'autre pigne et peste à l'autre bout
"Comme en '40 !"
Déjà tu plonges ta dérive vers l'Atlante...
"Oh, marin ! Marin...
tu soupires
"Marin ! Marin ! reviens me dire
"les parfums que l'or dans l'azur
"agite par les ouvertures
"Oui, celles qui donnent en plein
"sur l'océan qui te retient
"et te respire
"quand j'ai, le ventre dans les mains
"rempli de rêves à venir,
"besoin de rire"
Adieu, vent mauvais, dents qui claquent
et toute la carne patraque
La chanson que tu as en tête
fredonne ton nom : Juliette.
tiniak - Ruades © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
Illustration et médaillon :
"Hiver..." © 2008 Gaëna da Sylva, photographies