Sur le pont va le dernier homme
la journée qui l'a distancé
a passé de l'autre côté
ou se pèlent d'étranges pommes
cueillies dans de lointains vergers
Une dense fraîcheur installe
une avarie de suspensions
tombant, écailles sur le pont
et tout ce qui respire mal
par les rues qui baissent le front
La lumière peine à se faire
aussi continue que le lac
et sautille de flaque en flaque
en n'osant pas déranger l'air
dont la nuit ferme le grand sac
Elle fut là dans la minute
l'absence qui n'a pas tout dit
en laissant derrière elle un lit
navré que sa dernière lutte
n'y fasse pas l'ombre d'un pli
La buée fait à la fenêtre
une auréole de brouillard
où s'efface le boulevard
où du doigt tracer une lettre
où s'amenuise le regard
Un bruissement de la chaussée
évoque un lointain océan
dont l'ourlet frise en écrasant
son souffle à l'haleine chargée
sur le naufrage d'un géant
Le pont cabre avec insistance
son arche sur le fleuve sourd
aux joies comme aux peines d'un jour
confondu par son indolence
et son dédain de nos amours
tiniak - Ruades
© 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK