les paumés (1)
les mains pauvres
Si vous voyiez mes mains comme elles sont perdues
 à rechercher en vain le fruit de leur travail...
 Ça sentait bon le pain à l'aube dans la rue
 J’ai fouillé mon caban n'y trouvai que mitraille
alors j'ai caressé la faim qui me creusait
 le ventre jusqu'aux flancs et qui faisait le tour
 de toutes les nuits bues et ma cote d'amour
 qui battait là-dessus ne me pardonnait rien
alors j'ai recompté les pièces dans mes poches
 (peut-être bien aussi pour le bruit que ça fait)
 un vent s'était levé, me filait des taloches
 je ne comprenais plus comme il me conduisait
alors j'ai rajusté mon col sous les oreilles
 mais toujours hébété et gelé tout pareil
 je tapais dans mes mains - plutôt, j'applaudissais
 le journal quotidien autour de mes orteils
alors j'ai vu mes mains donner des coups de sabre
 pour achever les ombres qui traînaient encore
 - je vous parle de l'ombre et vous pensez la mort ?
 mais celle-là aussi m'évite sous les arbres
alors j'ai pris ma gorge comme un lampadaire
 et je l'ai secouée pour qu'en sorte, lumière !
 un cri, mon pauvre ! un cri à retourner la terre
Éden dont les fruits mûrs me donnaient du travail
 quand j'en avais le goût, le temps, tout l'attirail
main pleine
Un coup de dé jamais... je t'en fiche !
 Innocents, les mains pleines... ma foi !
Quand les dés sont jetés dérouillent les semaines
 - tous les valets du roi ne font pas une reine,
 et puisqu'il faut gratter, grattons... hardi, les gars !
pour pas rester marron, ni gris, ni chocolat
 En avant, martingales ! que ça pleuve
 et que nos berlingots s'émeuvent
Travailler ! pour quoi faire ?
 Pleurez, pleurez, chaumières
 ça va tomber, les tuiles
Gardez pour vos poignets ces quelques gouttes d'huile
 sous le coude, à l'abri
 dans les Chacun-pour-soi, tous les autres : tapis !
Accordons nos cordons d'ordres labyrinthaires
 Sortons du potentat le chien et sa mémère
 Jouons la bonne carte
Comptés tous les sabots, on taillera des pipes aux dés
 des costards à couteau tiré
 en priant le hasard de rester bien au chaud
Aux innocents,
  les rognures
 d'ongles
  sur les murs
Main-pleine,
  je rejoue
 Les règles ?
  t'en fous
La vie, c’est du sang plein les mains
La vie, c'est du sang plein les mains
 Lucie ! reviens
Je cognerai moins fort
 ...plus du tout
 ...bon, d'accord
 mets tes cheveux
 mets tes caresses
 nous sortons
 dandine un peu des fesses, allons ! on nous regarde
 et puis, j'en ai fini de ce pot de moutarde
 aujourd'hui, c'est grand train
 allez, Lucie ! reviens
Tu sais, j'ai réfléchi... mais pour ton épitaphe
 je n'ai pas su trouver la rime pour la baffe
entre de bonnes mains
Fais voir tes mains... Quelle horreur !
 Je sais bien d'où tu viens, allez ! tu as vu l'heure ?
 Ne fais pas tant de bruit, ton père est à côté
 Veux-tu que je te mette un plat à réchauffer ?
 C'est du lapin... c'est comme tu préfères
 Dis-moi, où as-tu pris cette mine sévère ?
 Aurais-tu quelque ennui ? te fait-on des misères ?
 Tu me dirais bien tout, n'est-ce pas ? je suis ta mère
Donne... allez, tes mains... donne...
 Pour toi les miennes seront toujours bonnes
mains droites
Main sur le cœur
 le chapardeur
 a juré ses grands dieux
 on a fermé les yeux
 il reprend son labeur
Main sur le front
 le beau garçon
 a fini son discours
 beurrant bien des amours
 dans un grand plat sans fond
Main sous le sein
 Lucie revient
 hanter son petit jules
 les genoux dans le pull
 et le regard éteint
La vérité d'une âme
 ne tient pas dans la paume
 méditons cet axiome
 avant - messieurs, madame,
 d'aller prêter serment
les paumés (2)
belle geste
D'un geste
 tout s'arrête
 un geste et tout reprend
 amour et châtiment
 un orage qui peste
 nuées de fleurs au vent
 et tes mains sinuant
 si chaudes sous la veste
 pourtant
 passe, funeste
 un lent revirement
 du ciel qui déforeste
 méticuleusement
 de l'horizon boisé la ligne mollissant
 
 paumé !
Le plan que j'ai en main ne me dit rien qui vaille
 et je n'y reconnais rien de rien où que j'aille
 je suis un étranger en pays incongru
Je regarde ma montre, elle ne dit pas l'heure
 j'interroge le ciel, il a son air boudeur
 grisonnant et chagrin qui me crache dessus
Je suis déjà venu par ici dans mon rêve
 ce rêve qui reprend sitôt que je l'achève
 celui où je ne sais lire le nom des rues
(mais, aussi, quelle idée d'écrire en cyrillique !)
Le plan que j'ai en main ne m'est d'aucun secours
 et la pluie qui remplit mes ourlets de velours
 s'en prend à mes lunettes, me brouille la vue
Les gens de par ici ne me sont pas curieux
 - on s'est connu en rêve ! et c'est bien, mais c'est qu'eux
 savent leur intérêt et filent droit dessus
Les échoppes bien rangées se ressemblent toutes
 je confie au hasard le destin de ma route
 vais les rues, les ruelles... places... avenues
(notez que c'est joli toutes ces arabesques !)
Le plan que j'ai en main finit à la poubelle
 j'ai lancé mon chemin sur les pas d'une belle
 elle était dans mon rêve et m'aura convaincu :
l'amour surgit encore où l'on se croit perdu.
  
 je, demain
À la bouscara
  la minette, la minette
 À la bouscara
  la minette souris-moi
À la bouscara
  la fillette, la fillette
 À la bouscara
 la fillette grandira
À la bouscara
  joliette, joliette
 À la bouscara
  joliette deviendra
À la bouscara
  Juliette, Juliette
 À la bouscara
  Juliette embrasse-moi
À la bisquerage
  je fais mon ménage
 À la biscadère
  je suis cuisinère
 À la biscodon
  je pilote des avions
  et j'emmerde les garçons
à deux doigts de finir
à deux doigts de finir
 je ne veux pas finir
 j'entreprends autre chose
 et souhaite que le jour prenne la pose
je lui trace des contours élastiques
 l'intronise éternel et chimérique
 je lui fais les yeux doux
 je lui fais les gros yeux
 et lui renfonce la nuit dans les cieux
à deux doigts de finir
 je ne veux pas finir
 aussi je renouvèle
 mon stock de rimes et de ritournelles
je leur compose de jolis écrins
 je les enroule comme serpentins
 les sors de mon carné
 vers un autre support
 ce carnet, oui, pour une page encore
à deux doigts de finir
 je ne veux pas finir
 et me figure apprivoiser la mort
Pour un doigt d'hydromel
Pour un doigt d'hydromel, je damnerais déjà
   tous les matins offerts
   avec la raie en biais
   par tous les lampadaires
   qui cyclopent en douce
   au long de l'avenue
   comme une orangeraie
   qui lèverait le pouce
   en plaidant sa nuitée
   paisible
   n'étaient tous ces moutards
   nuisibles
   et braillant leur cafard
   en se tenant aux murs
Pour un doigt d'hydromel, je damnerais pour sûr
   tous les pauvres missels
   aux pages erronées
   qui suintent des amen
   et des Plus-Haut-Des-Cieux
   et mangent la semaine
   au parvis des ans vieux
   que balaient feuilles mortes
   et poudre d'escampette
   bravache
   de quelques malappris
   potaches
   scandant des théories
   en se serrant les corps
Pour un doigt d'hydromel, je damnerais  encore
   tous les compagnons d'âme
   à l'abri, au secret
   dans le secret des flammes
   où brûlent du passé
   tous les chants méconnus
   et leurs ors et leur nombre
   et leurs sombres vertus
   et tous les gris sourires
   brillance
   qui n'a pas vu le jour
   et danse
   dans ma petite cour
   en se donnant la main
Pour un doigt d'hydromel, je damnerais mon chien !
  
tiniak ©2009 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
 illustration composée d'après
 Les mains du pauvre,Oswaldo Guayasamín.
 
Commentaires
bien failli me paumer aussi : ça se fait pas de rallonger des poèmes sans prévenir, dis, oh ! Heureusement, on m'la fait pas à moi... alors je suis venue, j'ai vu, j'ai reviendu et j'ai tout lu !
ça va grandir encore ???
tfasson j'le verrai bien, je veille, rien ne m'échappe... et c'est tant mieux parce ce serait dommage de passer à coté de cette merveille.
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! rime intérieure, que du bonheur !
(plaisirs d'auteurs)
ben, t'as combien de doigts à tes mains... ?
ben, moi pareil.
et donc...
"à deux doigts de finir"
;-) tsi hi.
aaaaaaaaaaaaaaaaah!!!!
ah ben ouais, non, d'ac : chuis gourde ;o)
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ouééééééééééééééééééé
à suivre : "pour un doigt d'hydromel..."
ce qui nous fait donc :
1 arsouille
1 gourde
1 doigt d'hydromel (pas 1 whisky d'abord ? ;o)
Ayé, on a une fine équipe.
...et moi, l'arsouille ! ouais...
tadaaaaaaa
fini
C'est fort cette histoire de moutarde et de baffe !
A demain, bien sûr...